Un dictionnaire pour communicants et non communicants

Le sujet du jour est un dictionnaire pour les communicants, qui pourrait bien servir aussi aux non communicants. Un petit ouvrage et une grande ambition, un livre utile écrit par Frédéric Fougerat, directeur de la communication chez Foncia : Le Dico de la Com – Dictionnaire de référence des mots de la communication. La communication est un métier passionnant exercé par des passionnés, qui ont parfois tendance à recourir à un jargon malheureusement un peu abscons, c’est un euphémisme. Frédéric aussi est un passionné, mais il a fait œuvre utile en se mettant à la hauteur des non communicants qui aimeraient mieux communiquer avec les communicants. Bref, une histoire de communicants et ce n’est pas  une nouvelle chanson de Maurice Chevalier. Dans cette courte interview j’ai soumis à Frédéric, 5 termes issus de son dictionnaire afin d’en démontrer l’intérêt par l’exemple.

Le dico de la com : un dictionnaire pour les communicants, et les non communicants

dictionnaire communicants
Un dictionnaire pour les communicants, c’est paradoxal. Pourtant ceux-ci usent souvent d’un jargon incompréhensible pour les non communicants (et même d’autres communicants qui sont dans un domaine différent). Raison de plus pour que l’un d’entre eux, Frédéric Fougerat, fasse le travail de communication pour la profession des communicants.

Dans la communication depuis 36 ans, Frédéric a toujours regretté de ne pas disposer d’un ouvrage de référence sur le sujet.

C’est cette réflexion et ce besoin personnel qui ont donné naissance à ce dictionnaire.

Il y a sans cesse de nouveaux mots dans la communication. On les manipule parfois de façon approximative. Il y a des mots auxquels on ne donne pas toujours le même sens ou la même attention

Un dictionnaire pour les communicants et pour clarifier certaines définitions

Ce livre lui a donc permis de partager une proposition pour ces mots, de clarifier certaines définitions, et, plus simplement, de mettre à jour ses propres  connaissances.

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« Les métiers dans la communication sont multiples. Quand on est dans les relations presse, on n’utilise pas le même jargon que dans la publicité, dans l’imprimerie, dans le digital, dans la communication financière », souligne Frédéric.

On doit parfois passer de l’un à l’autre. Tout le monde n’est pas expert de tous les métiers. Parfois, on retrouve autour d’une même table des personnes issues de métiers différents et qui ne partagent pas forcément la même expérience ni le même jargon.

Un dictionnaire facile d’accès pour les communicants, les étudiant, les curieux …

Ce dictionnaire est très facile d’accès, précise Frédéric, et s’adresse aussi bien à des professionnels qui peuvent vouloir s’y référer, qu’à des étudiants qui ont besoin de découvrir ou compléter leurs connaissances, ou à des curieux qui aiment les livres, ont envie de découvrir l’histoire, la culture, l’environnement des métiers de la communication.

Il n’est pas pensé comme un dictionnaire scientifique et universitaire qui ne s’adresserait qu’à des experts et des spécialistes.

Définition n°1 du dictionnaire des communicants : la communication faciale facile

La communication faciale facile (expression inventée par Frédéric) désigne un petit coup de communication basé sur un effet efficace immédiat, et non sur des éléments ou un contenu qui assurerait une promotion durable de la marque.

C’est le petit coup de com qui fait un petit effet immédiat et qui fait plaisir, mais qui n’est pas très durable dans le temps.

Ce n’est pas de la grande communication. C’est aussi ce que Frédéric appelle un mémo signature dans son dictionnaire.

C’est la petite satisfaction immédiate pour celui qui le le fait, pour la marque, pour sa notoriété, mais qui finalement disparaît aussi vite qu’il est arrivé.

Définition n° 2 du dico de la com : le marketing furtif

Le marketing furtif est une technique consistant à promouvoir une marque, ses offres et ses produits, sans que l’émetteur du message puisse être identifié

La marque communique indirectement par le biais des réseaux sociaux, de forums, de blogs ou en exploitant ses avis clients favorables.

Par exemple, pour un soda, cette technique de communication va montrer le soda sous forme de placement de produit, en montrant ses consommateurs heureux, paraissant branchés, émerveillés par la vie.

Tout cela sans que la marque ait besoin de s’exprimer elle-même. Ce sont ses consommateurs qui parlent pour elle sur leurs propres réseaux ou sur des réseaux professionnels, sans que la marque soit identifiée et intervienne directement.

Si votre marque est une loved brand et que vos consommateurs ont naturellement envie d’en parler, alors vous pratiquez le marketing furtif sans y être pour quoi que ce soit, précise Frédéric.

Le marketing furtif est souvent très négatif quand on se plaint de votre marque, mais quand il est positif, vous en bénéficiez pleinement. Il n’y a pas de problème de transparence puisque vous n’en êtes pas à l’origine.

Définition n°3 du dico de la com : la raison d’être

C’est le sujet à la mode aujourd’hui dans le milieu de l’entreprise. Frédéric a mis ce mot dans le dictionnaire parce qu’il a un impact sur la communication, sur la prise de parole, sur la communication corporate financière RSE.

La raison d’être désigne la finalité d’une entreprise

En France, la loi Pacte de 2019 permet d’inscrire la raison d’être d’une entreprise dans ses statuts. C’est un sujet de communication qui n’a pas encore de règles d’usage parce que c’est très récent. Chaque entreprise disposant d’une raison d’être communique de façon plus ou moins discrète aujourd’hui sur le sujet.

Définition n°4 du dico de la com : le « storytelling »

Frédéric a choisi dans ce dictionnaire de prendre les mots d’usage, qu’ils soient français, anglais, franglais, et parfois latins.

Bien que défenseur de la langue française, il a voulu rester pragmatique et n’a pas écarté les mots d’usage anglais.

Le « storytelling » est une communication narrative ou l’art de raconter des histoires au service d’une marque

Le storytelling permet de capter l’attention grâce à une histoire qui permet à la marque d’exister dans un contexte narratif. L’exemple le plus symbolique est celui de la marque Michelin et de son guide éponyme.

dictionnaire des communicants
Dictionnaire des communicants : deux pionniers du storytelling, Michelin et John Deere. Créés tous les deux entre 1895 et 1899, ils existent encore aujourd’hui

Le fabricant de pneumatiques, fournisseur de l’industrie automobile, a permis de valoriser sa marque en racontant aux automobilistes les routes de France, en leur faisant découvrir les meilleurs restaurants grâce à un guide devenu une référence, et même une société à part.

On dit souvent que le storytelling a été inventé par Disney, Frédéric considère qu’il a été, en tout cas en France, inventé par Michelin. A en croire les dates (Disney est né en 1901), l’histoire lui donne forcément raison.

NDLR : Joe Pulizzi cite John Deere avec The Furow 1895 comme étant un des inventeurs du content marketing avec un des premiers journaux d’entreprise. Un journal journal d’entreprise dans un esprit content marketing, donc non orienté produits, et qui existe encore aujourd’hui, 120 ans après !

Définition n°5 du dico de la com : communication

Cette définition, traitée dans ce dictionnaire des communicants sous forme de tribune, est probablement la plus longue de ce dico de la com, ce qui est logique.

La communication au sens premier, est un code commun à une espèce humaine ou animale permettant de transmettre une information ou une émotion par le langage, la communication verbale ou gestuelle, des attitudes, des comportements, et la communication non verbale, précise Frédéric.

La suite de la définition me permet de préciser que la communication, c’est aussi un métier

dictionnaire
La communication, un métier fantasmé et détesté et ce n’est pas nouveau (Séguéla : 1979)

C’est une des fonctions les plus fantasmées, désirée ou détestée. C’est écosystème de métier qui évolue à très grande vitesse, principalement depuis l’explosion du numérique. C’est une fonction qui s’est tardivement professionnalisée et qui exige toujours beaucoup de pédagogie tellement elle semble insuffisamment connue, autant par ceux qui pourraient la réduire à un gadget parfois coûteux et futile, et par d’autres qui s’imaginent compétents pour l’exercer.

  1. Est communiquant celui qui sait exploiter une idée et la valoriser, donner du sens au choix d’une couleur. Écrire un discours impactant à prononcer.
  2. N’est pas communicant celui qui parle le plus fort ou impose ses vues, mais plutôt celui qui sait convaincre et parfois même se taire.
  3. Est communicant celui ou celle qui est capable d’avoir une vision globale d’un projet, qui s’inscrit dans une stratégie qui en maîtrise et en assure la mise en œuvre, tant au niveau des moyens humains que budgétaires, en tenant compte des contraintes techniques, juridiques ou calendaires, avec des exigences opérationnelles et rédactionnelles, typographiques et graphiques.
  4. Est communiquant celui ou celle qui est capable de gérer une réputation ou une crise à une époque où l’instantanéité rythme les journées au son des notifications des smartphones.
  5. Est communicant celui ou celle qui est capable de s’engager et donc de décider. Car communiquer, c’est aussi maîtriser son calendrier, garder le contrôle de son image et de son discours.

Il n’est pas facile d’être performant en communication, notamment quand tout le monde estime pouvoir faire mieux que vous. Frédéric cite le psychiatre Carl Gustav Jung : réfléchir c’est difficile. C’est pourquoi la plupart des gens jugent et donnent leur avis, évidemment sans légitimité professionnelle.

Un point de vue personnel, affectif et gratuit peut devenir dans l’entreprise une position faisant autorité du fait de la simple position hiérarchique de l’intéressé dans l’organisation. Et ça, c’est dangereux, constate Frédéric.

Un point de vue personnel affectif peut devenir une position d’autorité du fait de la position hiérarchique de l’intéressé et c’est dangereux

Une consigne non professionnelle peut même amener à commettre des fautes techniques, juridiques, éthiques, typographiques.

Quand ce n’est pas votre métier, ce n’est pas votre métier. Le communicant n’est ni un marchand de rêve, ni un faiseur de miracles

La communication n’est pas non plus la variable d’ajustement de l’inorganisation des autres. Associer la comm à la fin d’un projet, c’est de l’incompétence ou une faute professionnelle de la part du chef de projet ou de sa hiérarchie, souligne-t-il. C’est pourtant parfois encore le cas suivant l’entreprise. L’autorité qui est accordée à la communication est l’autorité professionnelle de celui ou de celle en charge de la diriger.

La communication c’est un vrai métier, rigoureux et de labeur

C’est un métier de disponibilité vis-à-vis des autres, où on ne compte pas ses soirées ni ses week-ends. C’est un métier artistique qui permet aux créatifs de s’exprimer, mais aussi juridique, technique et logistique qui impose le respect de règles et de processus.

Si elle bénéficie de plus en plus d’outils, la communication est un métier dont les résultats ne sont pas scientifiquement garantis et qui conservent donc une part d’incertitude liée aux aléas de l’humain, de la technique, de l’actualité, de la météo, de la politique ou de tout événement imprévisible.

Recommandations aux jeunes communicants en réflexion sur leur futur professionnel

La communication est plus qu’un métier, c’est un écosystème de métiers. Il y a énormément à faire. Elle peut attirer d’énormes compétences, qu’elles soient techniques, créatives.

Il y a beaucoup à faire dans les métiers de la communication. Il y a certainement beaucoup d’avenir

On voit des métiers nouveaux qui apparaissent tous les jours dans cette profession. C’est un très beau métier. Il y a beaucoup à faire. Ce n’est pas toujours le métier encore le plus reconnu. Il y a aussi un travail de pédagogie à faire pour se faire reconnaître, pour faire reconnaître ses compétences.

Mais il y a vraiment de la place pour tout le monde. Il y a de la place pour la jeunesse et il y a de la place pour le talent, conclut Frédéric.

 

Frédéric a raison, en fin de compte, la communication — et notamment la communication digitale — est un beau métier à condition d’en maîtriser le vocabulaire (d’où l’importance de ce dictionnaire des communicants), de le considérer sérieusement et d’en respecter l’éthique.

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