Marketing de contenu en B2B : état des lieux et perspectives
Le Marketing de contenu, nous le pratiquons depuis 22 ans, mais cela n’empêche pas, au contraire, de prendre un peu de recul pour aller mesurer la réponse du terrain. Grâce à Opinionway, j’ai pu assister à la restitution d’une étude sur le sujet, avec une interrogation par téléphone de 283 professionnels du B2B. L’étude a été restituée par Emmanuel Kahn, Market Researcher & Sociologist chez le spécialiste des études de marché. Cette étude nous a permis de nous rendre compte de l’énorme essor du marketing de contenu en B2B, comme nous l’avions prévu il y a 3 ans au moment de la création de Visionary Marketing. Cette étude permet aussi de mettre des chiffres, de vérifier l’état de maturité du sujet auprès des professionnels mais aussi de prendre du recul par rapport à certaines perceptions du public marketing B2BEn réalisant ce glossaire Visionary Marketing s'est heurtée de front à un problème de taille : faut-il écrire BtoB ou B2B ? qui, à mon avis, méritent quelques remarques.
Content marketing en business to business : état des lieux et perspectives
Une étude pour mesurer les pratiques du marketing de contenu, voilà qui tombe à pic pour sortir des généralités et voir comment cette « nouvelle » pratique (qui date quand-même du 19ème siècle rappelons-le et qui fut inventée par un acteur B2B), se répand dans le marchéLa notion même de marché B2B ou B2C est au cœur de la démarche marketing. Un marché est la rencontre d'une offre et d'une demande français et notamment – mais pas exclusivement – en digital. [sur la photo : Emmanuel Kahn d’Opinionway]
Une étude sur le marketing de contenu, pourquoi ?
L’étude a été mise en place en dehors des études client classiques d’Opinionway (ils en réalisent 350 tous les ans et sur tous les sujets, pas seulement sur le politique) « pour prendre du recul sur [leurs] pratiques » a déclaré Emmanuel dans son introduction. L’histoire a commencé par le constat que les clients venaient voir Opinionway pour produire des études pour être plus légitimes sur leurs sujets et étendre leurs territoires. Le cabinet d’études a aussi vu arriver de nouveau intitulés de postes avec des cartes de visites marquées « responsables de contenus ». De quoi interpeler nos experts et sur la base de ces constats, ils se sont posé la question : quelle est la place du content marketing et quelles conséquences pour les organisations et qu’est-ce que ça change ? Voici la genèse de cette étude, alors que nous apprend-elle ?
Une réalité qui est en train de transformer les entreprises
La méthodologie s’est basée sur les entreprises de plus de 100 salariés « car on a vu plutôt de grandes entreprises se mettre sur ces créneaux-là » nous a expliqué Emmanuel Kahn. Ceci ne veut absolument pas dire que le content marketing n’est pas pertinent des comptes plus petits, mais l’étude était mieux ciblée ainsi. Elle a été menée sur un échantillon représentatif et a permis d’interroger 300 directeurs et responsables marketing dont 283 qui pratiquent le marketing de contenu (voilà déjà une première indication).
« Le marketing de contenu est un élément complémentaire …
… qui vient s’ajouter aux divers outils à la disposition des marketeurs » ajoute Emmanuel, ce n’est pas un outil exclusif mais il est fondamentalLe marketing fondamental est le chemin principal qui mène à la connaissance théorique du marketing. Mais que tirer de ses enseignements pour le B2B ? Lire la suite sur la page du glossaire dédiée au marketing fondamental (lettre "M"). Il est marqué par un enjeu majeur de posture de la marque (changement de discours et de position par rapport aux clients et aux publics), mais aussi par un enjeu de choix de supports de diffusion et enfin, un enjeu de perspectives (diffusion et impact). Balayons ici les différents résultats de l’étude et parsemons la de quelques remarques plus personnelles éclairées par notre expérience du terrain sur ce sujet.
La place du marketing de contenu dans les outils du marketeur
Alors quelle est la place et l’importance du marketing de contenu ? Fondamentale mais pas exclusive pour résumer en quelques mots les conclusions d’Emmanuel Kahn.
- les outils classiques restent les plus importants pour les marketeurs et notamment le marketing direct et le CRM, nous dit Opinionway. On peut sincèrement se demander si cela est encore pertinent aujourd’hui (hormis le CRM). Probablement que cela est le gap le plus important entre la France et le monde anglo-saxon où le Web devient le mode de communication le plus évident et le plus important. Ne nous trompons pas, c’est juste une question de temps. Ceci étant, les modes de communication classiques ne sont pas à négliger (le mailing papier revient à la mode par exemple car il est bon marché puisqu’il a été majoritairement abandonné). La tendance est néanmoins irréversible à mon avis.
- sur la production de contenu c’est 40% des entreprises qui considèrent que c’est un élément important et aussi sur la génération de leads (26%). Le content marketing est donc devenu clé en matière de conquêtes de nouveaux clients en B2B. Là encore, aux USA ou au Royaume Uni, c’est une évidence depuis plus de 10 ans.
- Il y a un écart plus large pour les grandes entreprises : pour les entreprises de plus de 500 employés pour qui la présence de salariés assurant la production éditoriale est cruciale et pour qui l’importance du marketing de contenu est encore plus important.
- mais le marketing de contenu est aussi un élément majeur de la boîte à outil de fidélisation : pour les entreprises de plus de 500 salariés on voit notamment que le marketing de contenu est même en tête des outils pour les plus grosses sociétés.
En conclusion de ces premiers résultats, l’importance du contenu est capitale mais quid des usages et des bonnes pratiques
Usages et bonnes pratiques du marketing de contenu
Les limites de cette étude sur le marketing de contenu « c’est qu’on va mesurer les bonnes pratiques qu’on a testées au départ » nous prévient Emmanuel Kahn mais cette étude reste, malgré cette mise en garde, fort intéressante car elle est unique, notamment dans sa profondeur et sa représentativité.
- on observe un recours avéré au marketing de contenu et de façon régulière ce qui est plus productif que juste en faire beaucoup : voilà une bonne remarque et souvent un des premiers efforts d’éducation du client dans le cadre des missions de marketing de contenu. Il ne sert à rien de produire du contenu pour le plaisir de produire du contenu, il faut le faire dans la durée et la régularité. Souvent, une marque, individuelle (blogueur par exemple) ou collective (marque commerciale) va préempter un sujet puis le laisser tomber. C’est comme cela que nous avons pu avec Visionary Marketing nous emparer du sujet du marketing client pour le compte de Mapp France. Le créneau avait été abandonné par un blogueur et permettait à notre client de se positionner.
- bizarrement c’est moins dans les grandes sociétés que l’on observe cette régularité mais plutôt dans les moyennes entreprises et surtout dans les services. Cela se comprend aisément car c’est dans ces deux derniers segmentsStricto sensu, segmenter signifie diviser son marché en sous-ensembles (segments) qui constituent des groupes homogènes et distincts que le marketing de contenu est le plus crucial et devient même essentiel. Ceci étant, on observe – également sur le terrain – un manque de maturité des plus grandes entreprises dans ce domaine de la régularité de la production de contenus. Idem pour les services, ce sont des cibles idéales pour le marketing de contenu, plus que pour les produits, qui sont obligés de choisir des sujets connexes. En conseil par exemple, le blogging est devenu quasiment indispensable pour conquérir et fidéliser de nouveaux clients.
- enfin, il reste 10% des répondants qui disent ne pas en faire et une partie d’entre eux sont conscients qu’il faut rattraper le mouvement. Je vois aussi une catégorie sur le terrain, constituée par les entreprises B2B qui ont été pionnières en matière de marketing de contenu et qui ont perdu la méthode. J’avais déjà parlé de ce phénomène en 2014 lors d’une conférence organisée par Scoopit et ce schéma s’est développé. Certaines de nos missions vont dans ce sens de la rééducation de l’entreprise, qui passe d’ailleurs souvent par une réflexion de fond sur le repositionnement du contenu et de sa stratégie.
Pourquoi le marketing de contenu et pour quels bénéfices
La question du bénéfice du marketing de contenu est une question très riche et qui fait aussi l’interêt fort de cette nouvelle étude d’Opinionway. Celle-ci permet de chiffrer précisément les bénéfices et de les mettre en exergue :
- d’abord, on les observe à différents niveaux et avant tout elle doit s’insérer de façon cohérente avec la stratégie de l’entreprise
- on observe 3 bénéfices repérés par les répondants de l’étude : commercial + communication + marketing : d’abord la communication, ensuite le commercial et enfin le marketing
- la frontière entre ces différentes bénéfices est matière à débat mais il y a indéniablement des enjeux majeurs de communication et de positionnement de la marque dans ces démarches de marketing de contenu. Dans tous les cas, les chiffres sont très élevés sur les 3 domaines et cela prouve qu’il n’y a pas UN bénéfice mais DES bénéfices au marketing de contenu. Cela prouve également que la preuve que la perception de ce bénéfice par le public B2B est bien nette.
– en bref, on observe beaucoup de bénéfices du marketing de contenu, y-compris de façon minoritaire, pour monétiser celui-ci (il est vrai que pour une marque, la monétisation de contenu est moins prioritaire même si des exemples célèbres existent comme Michelin et son fameux guide et, plus récemment, Menlook et la filialisation de son entité contenus). - Question supplémentaire : les bénéfices de ce marketing de contenu se fait-il sentir à court ou long terme ? « Il n’y a aucun doute pour les répondants qu’il y ait un bénéfice à long terme » nous dit Emmanuel Kahn. Mais les répondants voient aussi des résultats à court terme : enfin, plus intéressant encore, 48% des répondants voient l’intérêt du marketing de contenu à la fois à court terme et à long terme mais pas forcément avec les mêmes contenus ni pratiqués de la même manière. « Ces impacts à court terme permettent aux directeurs marketing de justifier des budgets » insiste Opinionway.
Quelles sont les conditions du succès pour le marketing de contenu ?
- D’abord la cohérence avec la politique de la marque : les répondants estiment qu’ils ne faut pas de dissonance mais qu’il faut une cohérence et une continuité. « Cela ne veut pas dire qu’on ne peut pas étendre la marque mais il ne faut pas être en contradiction avec ses valeurs » ajoute Emmanuel. Personnellement je trouve à la fois bizarre et banalement logique qu’on trouve cet élément en tête des facteurs clé de succès. C’est au contraire, à mon avis, une des raisons principales d’échec des politiques de contenu de marques.
Il faut assurer, mon expérience me l’a prouvé maintes fois, une cohérence sur les sujets (et encore, nous avons démontré de nombreuses fois la nécessité de sortir du cadre) mais surtout ne pas respecter le ton de voix corporate de la marque, propre à éteindre les ardeurs des lecteurs (et des contributeurs). La charteL’éthique du marketing couvre un champ très vaste de thématiques. Il faut tout d’abord voir l’éthique du marketing comme une sous-branche de l’éthique des affaires. est importante mais elle doit toujours passer au second plan et s’effacer derrière le sujet et le contenu.
Pour un blog par exemple, favoriser un blog « propulsé par la marque » vs un blog de marque. Cette difficulté à s’extraire du caractère corporate du contenu est cruciale, c’est pire qu’un facteur critique de succès, c’est une condition de vie et de mort du contenu.
– ensuite, selon les répondants, il faut faire attention à la « cible » et aussi s’adresser aux prospectsUne activité incontournable car les entreprises B2B perdent entre 5% et 15% de leurs clients chaque année. Deuxième raison d’échec des politiques de contenu de marque à mon avis : penser à « cibler » c’est adopter un langage marketing antique et militaire qui n’a plus lieu d’être.
Le bon Marketing de contenu ne cible personne, ce sont les lecteurs qui se ciblent eux-mêmes en sélectionnant le contenu qui les intéresse. En somme, pour bien toucher son audience, il faut savoir oublier qu’on s’adresse à une audience et crystalliser cette audience autour d’un contenu, de la même manière qu’un auteur de théâtre va attirer les spectateurs et jouer sur le bouche à oreilleLes recommandations, le marketing du bouche à oreille et les réseaux sociaux pour être incontournable. (très important en B2B).
De la régularité … et de l’originalité, que diable !
- autre critère, c’est la régularité de diffusion : il faut travailler dans la durée. Là, je suis entièrement d’accord, et je rajouterai : sans tomber dans la routine d’un travail mécaniste.
- la posture doit être différente : Emmanuel a insisté en disant que le marketing de contenu n’est pas de la pub. Il fallait bien le préciser en effet. « il existe une posture plus horizontale avec une mise à disposition du contenu et à partir de là il y a une mise en relation : c’est un changement pour la marque » a-t-il ajouté. On en entend parler depuis longtemps mais là on le voit concrètement et indirectement on va générer du business ». Elargir le sujet : au-delà du produit notamment. Cette posture me semble en effet un élément fondamental. Je l’aurais mis en premier.
– à noter l’originalité qui est dans le bas du tableau : encore un point qui me semble litigieux. L’originalité est au contraire cruciale en B2B où tous les clients ou presque ont compris l’intérêt du marketing de contenu. Nous l’avons démontré plusieurs fois, notamment dans le cas du travail sur le livre noir des big data avec notre client JEMS Group (400 téléchargement en une matinée et des milliers de vues sur Slideshare). - à noter ausi que si les clients ont compris la posture de marque différente de la démarche publicitaire, ils ne semblent pas avoir vu que les contenus ne s’arrêtent pas à des contenus riches. Les contenus produits ou les personaLe persona B2B permet de définir qui sont vos acheteurs cibles. marketing ne vont pas dans les blogs et oui ! ce sont des produits, mais rien ni personne n’a dit que cela devait être mal fait ni rébarbatif. Or, force est de constater que cela est souvent le cas. C’est une erreur grave à mon avis de dissocier marketing de contenu et qualité de contenu pour ses produits et ses services, je ne peux imaginer de concevoir l’un sans l’autre (même si je vois beaucoup de clients se tromper à ce sujet).
Les enseignements : retour à la réalité du content shock
Voilà les principaux enseignements que j’ai retirés de cette fort intéressante étude d’Opinionway dont vous pouvez trouver un extrait à télécharger ici et ci-dessous. Il y a bien aussi des remarques sur les modes de diffusion, et l’importance des médias sociaux, mais pour cela je vous renvoie à notre baromètre Hootsuite des médias sociaux dans le marketing que nous présenterons pour la première fois mardi 7 avec notre partenaire. En résumé je pense qu’on peut retenir les points suivants :
- le marketing de contenu en B2B est désormais perçu par tous les clients mais plus encore par les entreprises intermédiaires et notamment celles qui sont dans le service
- ils ont tous compris son importance aussi bien pour aller chercher de nouveaux prospects que de fidéliser ses clients (ça c’est une information très intéressante !)
- ils ont bien perçu l’importance du digital et utilisent les médias sociaux de façon intensive mais ne le font que timidement en continuant de privilégier des méthodes classiques, comme les salons professionnels par exemple.
Sans vouloir caricaturer avec des jugements à l’emporte pièce comme j’entends souvent, qui disent que les « salons ça ne marche plus », je nuancerais en disant qu’il y a certains salons qui sont extrêmement puissants en B2B (Le salon des maires pour les collectivités, le ecommerce 1 to 1 ou Roomn pour le mobile à Monaco, e-marketing en avril ou Big Data Paris par exemple etc.) mais qu’il y en a beaucoup d’autres, une majorité, où les ROI sont plus que faibles et douteux.
Et les investissements et l’immobilisation des commerciaux non négligeables. Il y a donc un gros essoufflement sur les salons qui ne sortent pas du lot et je n’ai pas vu dans les réponses des interviewés que le digital pouvait prendre plus d’ampleur par rapport à cela. C’est encore signe que nous pouvons encore évangéliser pendant longtemps.
Le marketing de contenu sort de l’anonymat mais quid du content shock ?
Le contenu sort de l’anonymat et devient majeur, nous l’avions prédit en 2014, et nous ne nous sommes pas trompés. Par contre, il semblerait que la plupart des acteurs du B2B n’ont pas vu venir le content shock, ni la nécessité de le contourner. Ils seront ramenés à la réalité du terrain très rapidement et mon conseil est de revoir cette liste de facteurs clés de succès pour assurer la réussite de ses initiatives de contenu marketing B2B.
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