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Le Growth hacking éthique n’est pas un oxymore

Le growth hacking a souvent une odeur de soufre, mais rassurez-vous, il est possible de pratiquer le growth hacking éthique. Toutefois, celui-ci exige un investissement important en temps et en réflexion, nous explique Frédéric Canevet au cours d’un webinaire passionnant dont vous trouverez un résumé ci-après. Contrairement à certaines idées reçues, le growth hacking, surtout s’il est éthique, n’est pas une solution miracle, mais une approche méthodique qui demande de la patience et de la persévérance. Mais cela en vaut la peine. Explications avec Frédéric, co-auteur d’un best-seller aux 10,000 ventes sur le sujet.

Le Growth hacking éthique n’est pas un oxymore

Growth hacking ethique
White hat, back hat ? Le growth hacking est souvent entaché d’une réputation sulfureuse alimentée par des individus peu scrupuleux dont certains qui ont bâti de véritables fortunes sur des démarches discutables. Mais le growth hacking éthique est possible nous explique Frédéric Canevet – image réalisée avec Midjourney sur notre mode personnalisé.

Peux-tu citer des exemples historiques de growth hacking ?

Frédéric Canevet : Deux cas emblématiques illustrent les pratiques controversées du growth hacking :

  1. Airbnb a démarré en exploitant les données de Craigslist (l’équivalent américain du Bon Coin). L’entreprise a développé un système automatisé pour extraire les annonces immobilières et contacter les propriétaires, leur proposant de gagner « 500 dollars par semaine » en listant leur logement sur Airbnb.
  2. Xavier Niel, à l’époque du Minitel, a créé un outil permettant d’envoyer des messages automatisés aux utilisateurs du 3615. Identifiant la messagerie rose comme secteur le plus rentable, il a lancé un service concurrent au 3615 Ulla et utilisé son système pour détourner leur trafic au travers de messages ciblés. Bien que cette pratique lui ait valu des poursuites judiciaires et un procès perdu, les bénéfices générés ont contribué à bâtir sa fortune initiale, notamment à travers un réseau de sex-shops lié à cette activité Minitel.

Le growth hacking peut-il s’inscrire dans une démarche éthique et responsable ?

FC : Oui, c’est possible.

growth hacking éthique
growth hacking éthique : le white hat finit par mieux payer que le black hat – image réalisée avec Midjourney sur notre mode personnalisé.

Comment ta vision du growth hacking a-t-elle évolué avec votre nouveau livre sur la déconsommation ?

FC : Notre approche doit considérablement évoluer face aux défis économiques actuels. Dans un contexte économique tendu, nous ne pouvons plus nous permettre le marketing traditionnel avec ses plans à long terme. Nous devons privilégier des actions courtes dont le ROI est rapide. C’est précisément ce qui a inspiré le growth hacking dans la Silicon Valley, où les startups devaient, selon le slogan consacré, « vivre ou mourir« . Dans un monde qui tend vers la déconsommation, l’enjeu est de faire plus avec moins.

Le growth hacking se décline en trois niveaux d’intervention.

  1. Le « white hat» représente les pratiques légales et éthiques, à l’image du « Fosbury flop » en athlétisme – une innovation révolutionnaire, mais respectueuse des règles. Cette approche s’appuie sur l’analyse du cycle d’activité selon la méthode AARRR : Acquisition, Activation, Rétention, Recommandation et Revenu.
  2. Le « grey hat» occupe une zone intermédiaire. Par exemple, l’automatisation sur LinkedIn, bien qu’interdite par la plateforme, reste largement pratiquée. J’ai personnellement expérimenté les risques de cette approche, ayant eu mon compte suspendu pour avoir géré deux profils distincts.
  3. Enfin, le « black hat» englobe les pratiques strictement interdites : création de faux comptes, usurpation d’identité, ou récupération non autorisée de données personnelles. Ces méthodes peuvent sembler tentantes à court terme, mais s’avèrent désastreuses pour la réputation et la pérennité d’une entreprise.

Comment garantir l’efficacité tout en restant éthique ?

FC : « Bourriner » en envoyant des messages non sollicités dans LinkedIn ne sert à rien. L’efficacité consiste plutôt à créer des liens authentiques. La stratégie que j’adopte tient dans la publication quotidienne de contenus à forte valeur ajoutée, démontrant une expertise réelle. Ce n’est pas une approche commerciale agressive, mais plutôt de l’inbound marketing basé sur la confiance.

En fait, c’est comme envoyer du spam par email. Tu envoies 10,000 emails et comme tu as 0,5 % de taux d’ouverture et un taux de clic un peu plus faible, sur la masse, tu obtiens des résultats. Mais à un moment donné, forcément, cela s’émousse. Sans parler de ta réputation qui en souffre.

Le growth hacking, le livre aux 10 000 ventes chez Dunod

Quant au « black hat », je m’y refuse absolument. Notamment les faux comptes rattachés au nom d’une entreprise, uniquement à des fins de récupération des données des listes de personnes et d’entreprises qui suivent la page de l’entreprise cible. C’est illégal, car c’est de l’usurpation d’identité. De même avec ces individus qui cherchent à récupérer les adresses email ou des numéros de téléphone des gens avec qui ils ne sont pas en relation. Je me refuse à faire cela, d’autant plus qu’il s’agit souvent de données personnelles.

L’efficacité du growth hacking éthique en chiffres

Pour illustrer l’efficacité de l’approche que je recommande, citons des chiffres d’Eloquant : plus de 20 % des 1 200 inscrits à nos interviews d’experts de la relation client cette année proviennent de LinkedIn, sur un secteur d’activité d’environ 15 000 professionnels. Notre objectif est de fédérer cette communauté, d’établir notre légitimité, puis de la convertir vers nos différents événements comme les webinaires ou notre salon « All for Customers ».

L’approche omnicanale devient incontournable face à la saturation des canaux traditionnels. Les indicateurs sont révélateurs : le taux de participation aux webinaires est passé de 35 % il y a 3-4 ans à environ 25 % aujourd’hui, 30 % au maximum. Le taux de visionnage des replays a également diminué, passant de 15 % à 12 %. Ces chiffres démontrent qu’il n’est plus viable de se reposer sur un canal unique. La diversification s’impose, incluant notamment une forte composante présentielle qui continue de démontrer son efficacité.

Quelle est l’importance de la personnalisation dans ton approche ?

FC : La personnalisation est cruciale. Même pour les souhaits d’anniversaire, nous adoptons une approche en deux temps : un premier message automatisé par mon assistante, suivi d’une interaction personnelle de ma part.

Et j’envoie les messages un par un.

L’IA ne remplacera pas l’humain, mais les professionnels qui maîtrisent l’IA surpasseront ceux qui l’ignorent. Notre expérience avec Smart Tribune illustre ce principe : lors d’un événement conjoint, nous avons dû mobiliser notre réseau et approcher individuellement chaque participant potentiel. La réussite dépendait de relations préexistantes et de liens personnels établis.

Cela a abouti ensuite à un livre blanc écrit en commun avec Apizee et Smart Tribune, sur la base d’une étude OpinionWay auprès de 1000 personnes. Nos partenaires ont utilisé l’IA pour la rédaction initiale. Si le début était convaincant, la suite trahissait clairement son origine artificielle : formatage mécanique, transitions artificielles, style caractéristique de ChatGPT. Nous avons dû réviser substantiellement ces sections.

L’IA reste un outil précieux, notamment pour le « copywriting ». J’utilise un GPT personnalisé pour générer des ébauches de posts événementiels. Le résultat, sans être exceptionnel, fournit une base de travail efficace qu’il convient ensuite d’adapter et personnaliser.

Comment le paysage digital évolue-t-il avec ces nouvelles pratiques IA ?

FC : On observe une chute significative du trafic SEO sur Google. Les blogs historiques ont été particulièrement impactés par l’arrivée de l’IA et la génération automatique de contenus. Google, peinant à distinguer les contenus authentiques, a commencé à privilégier les sites plus spécialisés et sectoriels.

Je constate dans mon entourage que de nombreux créateurs de contenus et blogueurs ont abandonné ou réduit leur activité. Personnellement, alors que le blog était ma priorité numéro un, il est maintenant passé en seconde position. Je préfère désormais me concentrer sur LinkedIn.

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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of many books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de plusieurs livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »

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