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Open innovation : sur un malentendu, ça peut marcher !

L’innovation ouverte vue par Accor et ContentSquare

Intrapreneuriat, Open Innovation… ces expressions du 20e siècle ont-elles encore leur place dans notre monde « Généaïsé » de 2024 ? Plus de 10 ans après les grands groupes ont-ils encore besoin des startups? Il semblerait que oui. C’est ce qu’une récente table ronde organisée par Maddyness a montré. La preuve en exemples. Natacha Heurtault en a fait le compte-rendu pour les lecteurs de Visionary Marketing.  

Open Innovation: « Sur un malentendu, ça a marché ! », L’innovation ouverte vue par Accor et ContentSquare

Open Innovation
Les experts qui ont partagé leur vision de l’Open Innovation avec nous. Crédits Photo Maddyness et RaiseLab. De gauche à droite : Paul Jeannest (RaiseLab), Maxence Fabrion (Maddyness), Jean-Christophe Pitié (ContentSquare) et Alix Boulnois (Accor)

L’Open Innovation, modèle fondé sur la collaboration entre entreprises, startups, chercheurs et autres acteurs extérieurs est un modèle sans cesse plus populaire, comme le montrent les exemples de ce billet. Ce concept d’innovation ouvert repose sur l’idée que les entreprises ne peuvent plus innover seules de manière efficace.

L’exigence de compétitivité leur commande de s’ouvrir à des collaborations et des sources externes, qu’il s’agisse de startups, centres de recherche, voire de partenaires issus d’autres secteurs.

Ce modèle est un bon moyen de partager les risques, les compétences et les coûts pour répondre plus rapidement aux défis des marchés

Pour explorer les défis et opportunités de ce modèle, Maddyness a organisé le 10 octobre 2024 un débat réunissant trois experts : Alix Boulnois, directrice générale Business, Digital & Tech chez Accor, Jean-Christophe Pitié, directeur marketing de ContentSquare, et Paul Jeannest, PDG de RaiseLab. Animée par Maxence Fabrion, journaliste à Maddyness, cette table ronde a permis de faire le point sur l’Open Innovation, tant du côté des grands groupes que des startups.

Open innovation
L’auditoire de cette conférence Maddyness du 10 octrobre 2024 sur Open Innovation — Crédits Photo Maddyness et RaiseLab

Accor : Une stratégie d’innovation diversifiée

Alix Boulnois, a insisté sur l’épithète de l’expression « Open innovation ». “Aucune direction de l’innovation ne peut être efficace en restant seule dans son coin”, a-t-elle ajouté.

Chez Accor, l’Open Innovation est à la fois une manière de se diversifier et de répondre à des problématiques concrètes. Le groupe adopte une approche combinant partenariats et investissements. En particulier, elle passe des accords avec des startups qui ont intégré le classement du French Tech Next 40/120.

Ce modèle va au-delà des simples collaborations commerciales, intégrant aussi des engagements financiers à travers des prises de participation.

Fullsoon : « sur un malentendu, ça a marché ! »

L’exemple de la startup Fullsoon illustre bien cette stratégie. Ce projet, né au sein d’Accor pendant la pandémie, a démarré sous la forme d’une initiative interne portée par l’équipe Data Science et « sur un malentendu, ça a marché » a résumé Alix Boulnois.

Son équipe de data scientists a développé un algorithme capable de prédire les besoins en stocks des restaurants en fonction de plusieurs variables. Connecté aux systèmes de caisse des restaurants, l’algorithme analyse les historiques de commandes et croise ces données avec des informations externes comme la météo ou les événements locaux. Cette combinaison permet aux restaurateurs d’ajuster leurs commandes et de réduire le gaspillage jusqu’à 30 %.

Le succès de cette innovation a poussé Accor à investir dans Fullsoon. Depuis, Fullsoon est une startup en forte croissance qui a remporté de nombreux prix et signé des contrats avec de grandes chaînes de restauration.

ContentSquare : Le product fit et la conformité comme clés de l’innovation

Jean-Christophe Pitié, directeur du marketing et des partenariats chez ContentSquare, a mis l’accent sur l’importance du « product fit » (adéquation de l’offre à la demande).

Les petites entreprises savent adapter rapidement leurs produits en fonction du retour des clients, ce qui leur permet d’innover plus vite et plus souplement que les grands groupes.

« Les startups, surtout dans le secteur technologique, peuvent obtenir beaucoup plus rapidement le feed-back du client, ce qui leur permet d’ajuster la R&D en temps réel », a-t-il expliqué.

Cependant, l’environnement réglementaire est de plus en plus strict, ce qui n’est pas sans poser de problème.

Ces enjeux liés à la conformité – RGPD, sécurité et respect des normes de conformité – font souvent figure d’obstacle pour les startups. Ils sont perçus par elles comme des barrières à l’entrée. Celles qui parviennent à surmonter ces défis deviennent souvent des partenaires de choix pour les grands groupes.

Open Innovation : impact de la crise du COVID

La crise du COVID-19 a profondément marqué l’industrie et la manière dont les entreprises abordent l’Open Innovation.

Pour Alix Boulnois, cette période a été un défi, mais aussi une opportunité de réorganiser les équipes et les priorités.

Même en période de crise, il est possible d’innover et de transformer des difficultés en opportunités
Alix Boulnois

Alix Boulnois a déclaré que l’Open Innovation repose en grande partie sur une culture d’essais-erreurs. Sans oublier l’indispensable humilité face à ses propres limites : « Il faut admettre qu’on ne peut pas tout faire tout seul », a-t-elle rappelé.

Structurer l’innovation ouverte : l’approche de RaiseLab

Paul Jeannest est fondateur et PDG de RaiseLab. Sa société a pour mission d’aider les grands groupes à naviguer dans l’écosystème en identifiant les bonnes startups et en structurant les collaborations.

Il distingue trois axes majeurs dans l’innovation ouverte.

  1. Définir une stratégie claire ;
  2. Identifier les bons partenaires ;
  3. Et mettre en place un cadre de collaboration opérationnel.

RaiseLab aide les entreprises à structurer cette collaboration pour qu’elle soit efficace. Un processus qu’il compare à un « Citymapper de l’innovation », qui n’indique pas seulement la direction à suivre, mais surtout le meilleur chemin à suivre.

Il recommande de simplifier et d’optimiser le processus de décision en interne. Ceci permet à toutes les parties prenantes –département M&A, Corporate Venture Capital (CVC), ou équipes d’innovation – de travailler de manière coordonnée en mettant de côté leurs égos.

En effet, un des enjeux majeurs est de s’assurer que toutes les options, internes ou externes, sont prises en compte de manière équilibrée et objective avant de choisir le bon « véhicule » d’innovation. L’idée est de maximiser l’efficacité en tenant compte de tous les acteurs possibles.

L’Open Innovation face à ses défis

Les défis de l’Open Innovation sont nombreux.

Outre les obstacles liés à la réglementation, l’un des plus grands freins reste la difficulté d’intégrer des cultures d’entreprise très différentes. Il faut bien sûr s’assurer que les équipes des deux parties, grandes entreprises et startups, partagent la même vision stratégique et les mêmes valeurs.

Faire coïncider les cultures

« Cela implique une adaptation réciproque », analyse Bruno Cracco, Managing Partner et spécialiste de l’Open Innovation chez Bengs. « Les équipes de la grande entreprise doivent accepter une façon de penser qui peut sembler contre-intuitive, s’autoriser à prendre des raccourcis, et à retrouver l’esprit entrepreneur des origines.

La startup doit de son côté accepter de s’insérer dans un cadre, penser au-delà du seul produit pour anticiper la nécessité d’excellence opérationnelle, indispensable pour passer rapidement à l’échelle de son partenaire.

Les deux doivent faire évoluer leur système de prise de décision, pour leur plus grand bénéfice. Les enjeux sont de taille : une innovation plus radicale, plus rapide et plus libre pour la grande entreprise.

En échange, la startup obtient un accès à des capacités inenvisageables autrement, une accélération de sa montée en maturité industrielle et un premier client d’importance. Autant d’atouts indispensables pour grandir rapidement et passer à l’échelle.

Les intervenants ont tous souligné l’importance du critère de « scalabilité » (montée en charge) des solutions développées. Pour qu’une solution soit adoptée à grande échelle par un grand groupe, elle doit non seulement répondre à un besoin immédiat, mais aussi être capable de s’adapter aux différents marchés et réglementations sur lesquels les grands groupes sont présents.»

Les enjeux de durabilité et de réglementation en Open Innovation

Les panellistes ont enfin abordé l’importance croissante des enjeux de durabilité et de conformité dans les stratégies d’Open Innovation.

Paul Jeannest fait remarquer que les grandes entreprises ont accru leur volonté de collaboration étroite avec des startups spécialisées dans ces domaines. Et en particulier ceux axés sur la réduction de l’empreinte carbone.

L’Oréal, par exemple, vise à ce que 100 % de ses produits soient fabriqués à partir de composants « verts » d’ici 2030

Cet exemple illustre parfaitement ce point.

Pour approfondir ce sujet je vous recommande le livre S’ouvrir pour innover autrement, la méthode infaillible, coordonnée par Fabrice Marsella, directeur du Village by CA Paris et paru chez Dunod en juin 2024.

Vous pouvez également consulter le compte-rendu de cette conférence sur le site de Raiselab.

Natacha Heurtault

Natacha has more than 20 years of experience in communication, press relations and influencer communication. She is a freelance communications manager for high-tech companies and start-ups.

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