Prédictions 2016 : le passé promis à un bel avenir
Je ne vais pas vous casser les pieds avec mes prédictions de 2016
Je vous propose à l’inverse une lecture à rebrousse-poils de certaines prédictions des gourous du Web, prises ici et là et passées au crible de mon analyse. C’est même l’objet d’un double article publié sur le blog de mon client Zebaz. La nouvelle année est arrivée, effaçant la précédente, que nous n’aurons pas de mal à oublier tant elle a été difficile sur le plan humain. Passons. Profitons-en pour souhaiter une bonne et heureuse année, bien plus heureuse, à nos lectrices et lecteurs, même si elle commence mal, avec l’annonce du décès d’un musicien aimé de (presque) tous, David Bowie (la visite est d’ailleurs terminée). La liste des décès des vedettes des années 60-80 ne fait que commencer, nous assistons certainement à la fin de la période des grandes stars universelles. Voilà ma première prédiction, mais elle est certainement le fait d’un biais d’observation. Il y a peu de chances pour que mon fils sache qui est David Bowie, et encore moins qu’il me chante par coeur “We could be heroes, just for one day…” (est-ce là le but de nos prophètes du marketing ? Devenir les héros d’un jour ?). C’est cette réflexion qui m’a mis sur la piste de cet article : tout le monde nous gratifie de ses prévisions marketing de l’année, mais que valent-elles ? Quel regard porter sur ces idées, et quelle valeur leur accorder ? Je vous propose un petit tour de piste de l’innovation, et enfin, je vous inviterai à lire l’article complet.
L’hyperbole des prédictions et du marketing
On ne peut nier une certaine tendance à l’exagération dans les prédictions qui fleurissent ici et là sur Internet. Non qu’elles ne soient pertinentes. J’ai notamment beaucoup apprécié les annonces sur la transformation digitale de notre ami Duperrin. Bon, c’est Bertrand, en même temps, on connaît le bonhomme et on sait qu’il est pertinent. Si on omet le visuel un peu prédictif, il a quelques mots saignants sur les CDO qui me rappellent des souvenirs. A part cela, on sait que le monde du marketing et de la high tech sont des habitués de l’exagération et de l’hyperbole. On y aime les superlatifs, les mots anglais (souvent vides de sens comme le dit le visuel). Le tout est de garder les cheveux bien attachés derrière la tête ce qui, vous en conviendrez, est un exercice particulièrement périlleux pour ce qui me concerne.
pour faire de bonnes prédictions marketing, il faut garder les cheveux bien attachés derrière la tête. C’est pour cela que je n’en fais pas !L’exercice annuel – pourquoi annuel d’ailleurs, est-ce à ranger aux côtés des bonnes résolutions de début d’année ? – des prédictions marketing est donc un pensum auquel nous avons tous droit. Pourtant, un regard critique sur ces prédictions me semble salutaire. Car les innovations ne sont pas linéaires, et encore moins binaires. Comme nous l’avons déjà démontré au travers de la critique de l’ouvrage de Scott Berkun intitulé “Les Mythes de L’innovation”, les chemins de l’innovation sont souvent impénétrables et appellent à l’humilité. La récente lecture de Wired World 2106(UK) à l’occasion de mon dernier voyage à Londres, m’a permis encore d’aiguiser les réflexions que j’ai développées dans l’article du blog de nos confrères nantais.
Prédiction : le monde de demain ressemblera au monde d’aujourd’hui et d’hier
Le titre n’est pas de moi. Il est de Russell Davies, le monsieur digitalDéfinition marketing digital, un terme utilisé en permanence et pourtant bien mal compris car mal défini du gouvernement britannique. Son propos est simple : les innovations arrivent lentement, les comportements changent lentement, nos sociétés développées ne sont pas bouleversées, sauf à la marge.
prédiction : nous sortirons un livre blancLe livre blanc (ou whitepaper ou position paper) est un des piliers d’une stratégie de content marketing B2B. Il est la preuve de votre expertise. sur l’innovation conjointe en 2016 (oui cela est une vraie prédiction) – graphique issu de notre prochain livre blancUn peu radical le bonhomme. Mais en fait il n’a pas complètement tort. Placez vous en haut des champs Elysées et regardez autour de vous. Maintenant, faites un rembobinage de 30 ans et retrouvez-vous au même endroit en 1986. Que voyez-vous. Hmm. Si on devait faire un film sur le monde qui a changé autour de nous en passant les années à l’accéléré sur les 40 dernières années on s’ennuierait un peu. Sans doute que si on enlevait Internet (et le sempiternel SmartPhone, qui n’est d’ailleurs qu’une évolution lente et prévisible de la téléphonie et aussi de la communication radio telle qu’on la pratiquait déjà pendant la 2ème guerre mondiale) on ne trouverait pas grand-chose. Et souhaitons que les nombreuses atteintes à la net neutralité de ces dernières années ne viennent pas mettre fin à cette belle et fondamentale innovation, qui est aussi devenu un de nos droits les plus ouverts à l’expression et d’accès à la connaissance. Ceci étant, Russel Davies a du travail. Finalement, les petits français, tout grognons qu’ils sont, sont bien meilleurs en e-government que les britanniques, selon le rapport 2014 des nations unies. Nous attendrons le prochain rapport avec impatience.
La réalité est moins binaire que ce que prétend Davies. Et si l’innovation de rupture n’est pas toujours là où on croit – et les exemples ne sont d’ailleurs pas si nombreux – il ne faut pas en déduire que nos innovations ne doivent être qu’incrémentales. Nous publierons d’ailleurs à ce sujet un livre blanc intitulé “Bringing Ideas to Reality: A Joint Innovation Perspective” que nous devons encore traduire en français (vous voyez un des graphiques du livre blanc ci-dessus).
Quoiqu’il en soit, les prévisions d’un futur en rupture totale, sont parfois risibles et prêtent à réflexion. C’est ce qui m’a amené à écrire ces fausses prédictions.
Les autoprophéties des prédictions de ceux qui savent où ils veulent vous emmener
En dehors des prédictions qu’il est difficile de décrypter, il y a celles qui sont aussi un peu cousues de fil blanc. Dans le même opus de Wired World 2016, Reid Hoffmann, l’excellent patron de LinkedIn nous en donne un bon panorama. Il y décrit ses prédictions, qui sont aussi autant d’investissements dans des compagnies certes innovantesL'innovation va de la compréhension (intuitive ou non) du comportement de l’acheteur à la capacité d’adaptation à l'environnement et promises à un bel avenir car … elles ont Reid Hoffmann à son board. Résumons-nous : si vous êtes riche et célèbre – et que vous avez réussi par le passé – et que vous investissez dans une start-up, la prédiction qui voudrait que ceux qui investissent dans la même start-up deviennent aussi riches et célèbres n’est pas complètement idiote. Elle n’est pas complètement garantie non plus. Mais elle permet néanmoins de remplir les prédictions de l’année à venir à son avantage car si vous avez choisi une tendance, et que vous faites la tendance, alors, cette tendance pourrait bel et bien se réaliser. Et si en outre ce visionnaire habite Palo Alto et qu’il est en contact quasi permanent avec une caisse de résonance appelée Wired (entre autres) alors là, vous avez vraiment une tendance en béton armé.
Essayez de faire la même chose depuis Neuilly sur Seine et nous en reparlerons.
Ces auto-prophéties, sont les grands classiques du monde high tech, où un visionnaire impose sa vue du monde, et le monde le suit car sa réputation est déjà faite. Loin d’éclairer le monde sur comment fonctionnent les innovations, elles contribuent plutôt à brouiller la vision des marketeurs.
Au-delà des auto-prophéties il y a un véritable besoin de comprendre les innovations
Au-delà du caractère légèrement cabotin de mon introduction, ne nions pas le besoin de savoir où vont les prédictions cependant. Au contraire même, plus il y a de prévisions sur les tendances du marketing, et plus les clients sont perdus. Qui croire ? Pourquoi ? Avec quel niveau de certitude ? Ou d’incertitude ? Les innovateurs qui sauront expliquer aux autres comment décrypter les innovations ont de beaux jours devant eux.
Marketing B2B : prédictions et anti-prédictions de 2016 (1/2) – Zebaz Infos
Vous avez lu toutes les prédictions, mais que valent-elles vraiment ?Les prédictions sont le marronnier par excellence, le passage obligé de tout marketeur qui se respecte : une longue liste de choses qui “arriveront bientôt”, sans qu’on puisse toujours justifier le futur de l’indicatif ni que nos Nostradamus de l’Internet se prêtent au jeu du contrôle ultérieur de leurs dires.C’est d’ailleurs dommage, car les principaux enseignements en innovation sont à tirer de la comparaison entre les prédictions et ce qui s’est véritablement passé. Une preuve par neuf toujours enrichissante à mon humble avis.Il fut un temps où je refusais à tout prix de faire des prédictions, et de céder à la mode de fin ou de début d’année qui consiste à deviner ce qui va arriver dans les 12 prochains mois.
Il est vrai que c’est un exercice périlleux.J’ai pour cela une explication simple. Il est facile de se tromper sur les technologies, de croire qu’elles arrivent très vite, que le monde change en un instant, que tout est facile et magique. Celui qui, plusieurs fois dans sa vie a fait de bons choix technologiques, sait aussi qu’il s’est souvent trompé et qu’évaluer une tendance est un art plus difficile qu’il paraît.
En voici les raisons :
- Le temps et la preuve du terrain : ce n’est qu’avec le temps que les vraies innovations prouvent leur utilité et trouvent leur place dans le monde du business
- Les technologies prévues dans un objectif bien défini finissent souvent par être utilisées dans un autre but. C’est ce qu’on appelle le “pivot” et les exemples abondent
- Le rêve des uns est le cauchemar des autres : ce n’est pas parce qu’un innovateur a envie de changer le monde autour de lui que celui-ci est majoritairement d’accord. Les avis contraires s’opposent souvent pendant longtemps dans ce que j’ai décrit comme étant la “phase de digestion des technologies” (voir le schéma ci-dessous issu de mon ouvrage les médias sociaux expliqués à mon boss – éditions Kawa)
- L’innovation est affaire de point de vue : ce que d’aucuns trouvent innovant est considéré comme peu innovant par d’autres. Je vois encore des gens s’émerveiller – ou s’effrayer – en regardant des QR codes, pourtant inventés et utilisés depuis 22 ans par Toyota pour gérer leurs pièces détachées ;
Source : Marketing B2BEn réalisant ce glossaire Visionary Marketing s'est heurtée de front à un problème de taille : faut-il écrire BtoB ou B2B ? : prédictions et anti-prédictions de 2016 (1/2) – Zebaz Infos