CRM et Expérience clientTransformation digitale

Transformation digitale : ne perdez pas de vue l’expérience client

expérience clientLa conférence du G9+ du 18 septembre qui s’est déroulée dans les locaux de Microsoft a tenu ses promesses : invités de marque, amphithéâtre plein à craquer, débats intéressants générateurs d’idées, et un thème fondamental : celui de la transformation de l’expérience client par le digital. En cela, le G9+ a démontré qu’il avait tout compris des vrais enjeux de la transformation digitale en choisissant le titre parfaitement. Reste à se demander si les débats ont permis d’apporter la bonne réponse à cette bonne question…

Transformation digitale et expérience client

J’ai malheureusement trop tardé pour écrire ce compte rendu et je ne peux retrouver tous les tweets de la salle qui résumaient, à mon avis, la véritable teneur du débat : en sont restés un ou deux que j’ai pu retrouver. Et notamment celui de Mark Tamis (dernier sur l’image), qui m’a frappé et orienté dans l’écriture de ce compte-rendu en forme d’analyse : « on parle quand de l’expérience client ? #cxp #G9plus » (8:19 PM – 18 Sep 2014). Cette impression je l’ai quasi systématiquement lorsque j’entends des discours sur la transformation digitale, une impression qu’on est souvent à côté de la plaque, que l’on fait de la transformation pour le digital et non de la transformation avec le digital. C’est d’ailleurs ce qui m’a poussé, en mars 2014, à écrire avec Philippe Colin, mon livre blanc sur la face cachée de la transformation digitale (https://visionarymarketing.com/transfo).

 

Les tweets (entre autre) de Mark Tamis et Dolores Fraguela ont posé le débat et orienté cet article

la table ronde du G9+ le18 septembre 2014 dans la superbe salle de Microsoft à Issy les Moulineaux. Je n'ai rendu compte que de deux des expériences présentées, celles de la SNCF et de 3DS, qui m'ont titillé les neurones
la table ronde du G9+ le18 septembre 2014 dans la superbe salle de Microsoft à Issy les Moulineaux. Je n’ai rendu compte que de deux des expériences présentées, celles de la SNCF et de 3DS, qui m’ont titillé les neurones

Qu’est-ce que l’expérience client au juste ?

Le titre de la conférence du 18/09 du G9+ était : « L’expérience client à l’ère du digital: regards croisés de dirigeants sur une mutation sans précédent ». Mais qu’est-ce que l’expérience client ? Voilà la question ! Équiper ses contrôleurs (changez le mot contrôleur par ce que vous voulez) de Smartphones ? Prévoir la fraude via les Big Data ou faire de la « science-fiction ». Pas du tout. L’expérience client est faite de petites choses… De petits riens qui veulent dire beaucoup pour les utilisateurs et les clients : l’accueil, la livraison à temps, trouver la bonne information au bon endroit, la ponctualité (pour les transports)… Et, chers lecteurs de Marketing & Innovation, il y a aussi l’innovation.

L’innovation et l’expérience client : ces petits riens qui signifient beaucoup

Si si ! L’innovation, elle aussi faite de ces petits riens qui rendent la vie de tous les jours un peu moins grise : l’accès à Internet dans les trains par exemple, testé dès 2003 par les opérateurs et effectif chez Thalys depuis bien longtemps. Mais sur le réseau ferré national ? Non, nous ne l’avons pas. Ni les écrans dans les sièges (Ice de Siemens et tous les avions), ni même les sites Web unifiés entre RATP SNCF (je ne parle pas de fusionner les organisations, juste de faire en sorte que les horaires des trains ne soient pas dissociés), et encore moins de machines de réservation dans les gares parisiennes qui ne datent pas de la guerre 14 et qui vous envoient votre billet sur le smartphone par exemple et qui ne mettent pas 3 heures à vous faire naviguer dans des menus mal conçus et lents. Et quid, puisqu’on parle de la RATP, des imprécisions, parfois frappantes, du système d’affichage des horaires… la liste est longue, je suis certain qu’en y passant 1 ou 2 heures, nous pourrions trouver une vingtaine de ces petits-riens qui changent tout et ne nécessitent pas, pour certains, d’investissements conséquents.

Certes, ne boudons pas notre plaisir, le système sus-cité d’affichage des horaires est une très bonne application du digital (même si ce n’est pas nouveau non plus, les premiers tests remontant à 2003 avec Capgemini). Et en tant qu’avide et constant utilisateur des transports en commun, je recours à lui régulièrement. Mais il a ses lacunes qui pourraient être comblées. Je sais ce que vous allez me dire : la RATP n’est pas la SNCF, le département « truc » ne parle pas avec l’entreprise « machin » … et voilà justement ce qu’est l’expérience client : au-delà des clivages, au-delà des organisations, on doit être capable de faire fonctionner l’innovation. Après tout, le RER B ne s’arrête pas à la Gare du Nord, alors pourquoi ne pourrions-nous pas améliorer les choses sur des bouts de codes et des programmes informatiques : ceci devrait être beaucoup plus aisé.

Un discours trop orienté vers la technolâtrie

Pourtant le type de discours que nous entendons toujours est très éloigné de ces petits riens et le 18 septembre, les participants de la table ronde n’ont pas dérogé à la règle : « nous avons équipé tous les agents (Smartphones/tablettes) pour avoir un temps d’avance » nous a dit Barbara Dalibard, patronne de Voyages SNCF. Mais cela enrichit-il l’expérience du client ? Celui-ci a-t-il une perception de son acte d’achat et/ou de son voyage qui soit améliorée par cet équipement massif et certainement très utile par ailleurs ? Je pose la question.

le parcours client-visionarymarketing

Légende : je rappelle au passage les points de vigilance de l’expérience client … Ils sont nombreux (ici en B2C vu par iventures et avec mes notes ; il s’agit d’un exemple pour le e-commerce, il va de soi qu’il faut l’adapter au brick and mortar, je vous laisse faire la traduction)

Un expert des transports à la rescousse

N’étant pas expert en transports, je me suis rapproché d’un de mes amis consultants, ancien collègue de Cap Gemini qui est issu de ce monde du transport et spécialisé dans le domaine. Il m’a fait remarquer qu’en quelques années cette ponctualité des trains avait beaucoup baissé ces derniers temps. M’étant renseigné sur les chiffres, je remarque un bilan plus nuancé avec des remontées des moyennes. Mais chacun sait que ces moyennes ne veulent rien dire. Etant parisien, et en tant qu’ancien londonien, je suis très satisfait du service. Mais l’expérience client d’un habitant de, par exemple, Vélizy, Clamart, Sevran Bodottes ou Villeneuve St Georges n’est pas du tout la même : les moyennes sont trompeuses ! Et en quoi le digital a-t-il (ou même pourrait-il ?) améliorer cet état de fait ? Il n’est certainement pas le premier en cause.

Par ailleurs, les taux de fraude subits par la SNCF et évoqués en termes alarmistes par sa dirigeante semblent (je les ai découverts) incompréhensibles, et les taux de recouvrement des PV hallucinants : on assiste à des situations aberrantes où des individus apparemment très nombreux qui impriment des billets et les annulent à la dernière minute puis viennent se présenter dans le train quand-même (si vous êtes intéressés, voici les méthodes possibles et le coût de la fraude en millions d’euros). Il est vrai que cette situation me rappelle beaucoup de souvenirs. Le nombre de fois où j’ai pris le TGV, et pourtant je ne le prend pas souvent, et où je me suis retrouvé assis à la même place que quelqu’un… Et il y a un loup quelque part et sans doute que le digital peut jouer un rôle là-dedans, même s’il ne peut faire cela tout seul (il y a des méthodes plus simples)… sans aller jusque là tout de même !

comment lutter contre la fraude – humour : et regardez à 1:11 🙂

 

Le verre à moitié plein : les initiatives digitales de la SNCF

IDPass-transformation-digitaleCertes, il y a le verre à moitié plein : 1 billet sur 2 est vendu sur Internet (mais est-ce une bonne expérience client pour autant ? Je n’ai pas que de bons souvenirs, mais comme il n’y a pas de concurrence, on est bien obligé de s’adapter). La carte voyageurs bientôt être lancé elle va s’appeler IDpass et intégrera la RATP la SNCF le Vélib’ etc. de bout en bout : cela sera mis dans le téléphone utilisera le NFC (qui va enfin décoller car Apple s’est enfin décidé à s’y mettre, enfin pour ceux qui ont les derniers modèles, donc pas pour tout le monde). C’est une innovation intéressante que nous saluons. Signalons tout de même que votre serviteur a vu les premiers tests du Navigo dès 99, travaillant alors pour la RATP : il était temps de faire quelque chose. Il y a bien aussi les RER et les TGV qui ont des blogs de ligne… Mais, même si je suis un fanatique des blogs et du marketing de contenu, surtout en UGC, là non plus je ne suis pas sûr que ce soit l’urgence dans l’expérience client.

Dassault Systèmes fabrique des chaussures avec une imprimante 3D

D’autres expériences furent montrées lors de cette conférence du G9+ notamment par Bruno Delahaye, VP de Dassault Systèmes, l’éditeur de logiciels spécialisés dans la 3D. Le grand éditeur a fait un test de mise en œuvre de l’impression 3D, dont on comprend de mieux en mieux comment elle va s’insérer dans nos vies, pour montrer de façon rapide les résultats d’une fabrication sur la base des besoins d’un client. Pour cela, ils ont travaillé avec Julien Fournié lors de la Fashion Week de Los Angeles.

Derby Colored 3D Image (1)

La chaussure de Julien Fournié, conçue par des clients en direct (bon, ce ne sera pas pour moi entre nous)

Celui-ci a déclaré qu’il n’avait jamais fait de chaussures auparavant, exercice auquel il s’est livré lors d’un magasin éphémère dont on peut se demander si l’expérience est pratique ou théorique même si Monsieur Delahaye insisté sur les deux côtés de l’opération. On est plus dans l’innovation d’anticipation ici, mais on comprend bien que quelque chose d’important est en train de se passer avec l’impression 3D, même si j’ai un peu de mal à comprendre comment on peut imprimer 1 chaussure dans un temps suffisant pour pouvoir l’essayer tout de suite. On peut toutefois imaginer une expérience client différente (cette fois-ci c’est de l’expérience client… un jour… peut-être) avec la possibilité pour l’utilisateur de concevoir lui-même son propre produit. Dans ce cas, même si c’est un peu tiré par les cheveux, on comprend comment l’innovation peut arriver à changer cette expérience client et réaliser le rêve du marketing, c’est-à-dire la personnalisation totale du produit en fonction de l’utilisateur.

Que retenir de cette dernière conférence du G9+ ?

Que finalement l’innovation : NFC et unification des accès, écoute du client et transformations de l’expérience de vente, d’achats et de consommation ont encore bien du chemin à parcourir. On sent bien le potentiel de la technologie pour transfigurer cette expérience client. Ce que l’on peut regretter cependant c’est que les discours communément entendu ici et là, partent tous de la technologie.

Dans un sens cela se comprend et s’explique : l’innovation arrive par la technologie par la rupture technologique, on obtient quelque chose de pas forcément très clair, qui est nouveau, puis on tente plus ou moins habilement de l’appliquer au terrain et d’essayer d’améliorer les choses.

C’est le cas de l’explication de 3DS sur le changement d’expérience client au travers de la personnalisation du produit d’impression 3D, et bien que cela paraisse un peu mis en scène et qu’on n’ait pas la sensation (en tout cas pour ma part) de tout comprendre au-delà de l’aspect « communication », on saisit bien de façon plus ou moins diffuse que la possibilité de concevoir soi-même un produit peut changer radicalement l’expérience de consommation mais aussi probablement l’expérience de vente, car si une simple imprimante 3D (reste à voir) et un ordinateur sont suffisants pour imprimer un produit personnalisé, on se demande si justement on ne pourra pas ouvrir ces métiers à des gens qui sont plus indépendants et peut-être un peu moins industriels (reste à voir aussi).

J’ai un peu de mal encore avoir aujourd’hui comment cela peut s’insérer dans une consommation massive, avec des milliards de consommateurs, mais j’arrive aisément à imaginer que quelque chose puisse arriver.

Dans l’autre cas, plus basique, des transports, il n’y a pas besoin de faire une étude de marché pour savoir ce dont les consommateurs et les clients ont besoin. Car dans ce cas, non seulement des expériences ont déjà été menées, mais certains opérateurs et transporteurs et/ou fabricants ont déjà nettement amélioré l’expérience du voyageur. De plus, la quasi-totalité de la population ayant désormais pris l’avion, tout le monde sait ce qu’il est possible de faire avec une distribution numérique multimédia dans un mode de transport. Et ce depuis longtemps.

On pourrait imaginer de faire beaucoup mieux certainement avec la technologie actuelle, sans trop faire de science-fiction. Encore faudrait-il que tout le monde paie son billet et que la marge puisse servir à réinvestir pour le confort du client. Tout cela n’est pas véritablement affaire d’innovation, mais plus de gestion.

Dans tous les cas, il y a certainement beaucoup de choses à faire, et certainement pas parmi les plus chères pour améliorer l’expérience de transport, notamment en région parisienne qui, soyons francs, n’a pas beaucoup évolué depuis 1906, ou à peine.

Disparition de la 3G dans les transports parisiens

Pire, d’un point de vue transformation de l’expérience digitale du transport parisien, il y a même tendance à la régression avec la disparition il y a quelques années (2011 ou 2012 ?) de l’accès 3G (note : 1 voyageur sur 2 a un Smartphone environ). Voilà un sujet de base qui est de l’innovation de terrain et qui mériterait d’être retravaillé afin de redécouvrir l’expérience client. Le digital peut aider cette expérience client mais l’expérience client ne doit pas se mettre au service digital, c’est une inversion du problème.

Yann Gourvennec
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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »
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