Pourquoi nous nous sommes perdus dans le metaverse
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Perdu dans le metaverse est le titre du dernier livre d’Alain Lefebvre. Il y explore les différentes possibilités qui pourraient s’offrir à nous dans ces univers virtuels en immersion profonde. Loin d’être sceptique sur le concept de metaverse, Alain nous avertit sur le temps qui sera nécessaire à sa construction et sa généralisation. Nous profiterons de cette interview pour rappeler la définition du metaverse.
Perdu dans ce metaverse qui n’est pas ce que vous croyez
Alain nous plonge en immersion totale grâce à un procédé qu’il appelle le transfert synaptique : un processus où on fait une copie de soi-même.
Cette copie est autonome dans l’univers. Elle est inconsciente pendant son parcours, et récupère le souvenir au réveil, y compris la mémoire sensorielle de ce qu’elle vient de vivre.
Perdu dans le metaverse ou perdu dans le vocabulaire ?
Ce qu’on appelle metaverse est de l’abus de langage. Tout ce qu’on appelait auparavant Univers Virtuel s’appelle maintenant metaverse. C’est totalement ridicule
La frénésie spéculative autour de l’immobilier virtuel dans The Sandbox ou Decentraland est à ses yeux complètement grotesque.
Le metaverse est un concept qui admet certaines définitions, mais pour le moment aucun environnement virtuel ne s’en approche, même de loin.
Quand le metaverse existera, il n’y en aura qu’un, de la même façon qu’il n’y a qu’un Web. Le Web n’est pas organisé en silos où pour aller sur tel ou tel site, il faudrait utiliser tel ou tel navigateur.
L’interopérabilité est requise pour passer d’une à l’autre de ces différentes poches virtuelles
Alors, et seulement lorsque nous aurons réalisé cette interopérabilité, le metaverse sera permanent, synchronisé, sans plafond.
Perdu dans le metaverse ou dans le data center ?
« Dès qu’on est sérieux sur les critères, on s’aperçoit que les capacités de l’infrastructure et les capacités de calcul exigées sont très au-dessus de ce qu’on peut offrir aujourd’hui », souligne Alain.
« En 1996, un plug-in VRML disponible pour Netscape permettait d’avoir des environnements 3D dans son navigateur. Il ne permettait pas grand-chose parce que le plug-in étouffait tellement le navigateur que ça plantait très vite ».
On en est là aujourd’hui avec le metaverse, souligne-t-il.
La véritable définition du metaverse
Aucun data center n’est capable de faire tourner un metaverse qui ressemblerait, même de loin, à la définition de Matthew Ball.
« Les conceptions les plus courantes du metaverse sont issues de la science-fiction.
Dans ce cas, le metaverse est généralement dépeint comme une sorte d’Internet numériqueDéfinition marketing digital, un terme utilisé en permanence et pourtant bien mal compris car mal défini “branché” — une manifestation de la réalité, mais basée sur un monde virtuel (souvent semblable à un parc d’attractions), comme ceux décrits dans Ready Player One et Matrix.
Et si ce genre d’expériences est susceptible de constituer un aspect du Metaverse, cette conception est limitée de la même manière que des films comme Tron ont dépeint Internet comme une “autoroute de l’information” numérique littérale faite de bits. » [Matthew Ball, le Metaverse, ce que c’est et où le trouver]
NDLR Selon Matthew Ball, le metaverse comporte 7 caractéristiques :
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- Être persistant — c’est-à-dire qu’il est indéfiniment en ligne et sans discontinuité
- Être synchrone et vivant
- Être sans limites d’utilisateurs simultanés
- Être une économie pleinement fonctionnelle
- Offrir une interopérabilité sans précédent des données, des articles/actifs numériques, du contenu, etc.
- Offrir une expérience à la fois numérique et physique
- Être peuplé de « contenus » et d’« expériences » créés et exploités par un éventail incroyablement large de contributeurs, dont des indépendants.
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Comme l’indique Alain, ces critères ne semblent pas correspondre à la vision de Mark Zuckerberg. Après, bien entendu, les règles peuvent être adaptées.
Il n’a été écrit nulle part, par exemple, au début de l’Internet, que l’immense majorité des recherches en ligne seraient effectuées par une entreprise privée à but lucratif.
Par ailleurs, Meta reste l’acteur le plus sérieux sur cette question, nous prédit Alain Lefebvre.
La réalité virtuelle en prend pour son grade
« Second Life lui-même ne s’intéresse pas à la VR. Les utilisateurs ne le demandent pas, ils ne sont pas équipés. Et s’ils ajoutaient une fenêtre de réalité virtuelle à leur environnement, ils pourraient servir à peine 1/10 e de leurs utilisateurs » ajoute Alain Lefebvre. «Leurs serveurs seraient à genoux tout de suite ».
Le metaverse va prendre encore des dizaines d’années
Personne n’est prêt à accepter que quelque chose qui l’intéresse aujourd’hui, mette plus de cinq ans à se réaliser
Le metaverse est une notion intéressante. Elle finira par émerger sous forme de simulation immersive dans le futur lointain, nous explique Alain.
Mais avant cela, dans quelques années, une nouveauté renversante peut émerger et se matérialiser comme le nouveau Web, par exemple le Web spatial.
Le metaverse nécessite la construction d’une infrastructure transverse qui va ressembler au World Wide Web
Meta est à ses yeux le seul acteur réellement sérieux sur la question.
Actuellement, Meta est le seul acteur qui a à peu près toutes les cartes en main pour commencer à définir ce que pourrait être à l’avenir quelque chose qui tendrait à être comme le metaverse
Perdu dans le metaverse ou les autoroutes de l’information ?
Alain ne croit pas à un scénario de type autoroutes de l’information ou un grand acteur ramasse le morceau ; et où il mangerait tous les autres.
Il croit plutôt à un scénario de type Web. Un scénario ou des standards apparaissent et sont nécessaires et suffisants pour offrir un certain niveau d’interopérabilité. Ce qui éviterait l’enfermement dans des silos.
Personne ne sera prêt à accepter durablement l’enfermement en silos, car cela aura ses propres limites
Le B2B va être influencé par le B2C et pas le contraire
Depuis les 20 dernières années, le monde du jeu vidéo a été beaucoup plus dynamique que le monde du logiciel professionnel.
Il y a un mouvement de recul quand on parle du domaine des jeux vidéo parce qu’on pense que ce n’est pas sérieux, qu’il s’agit d’ados qui se tirent dessus
Beaucoup d’expérimentations qui ont été faites en ce domaine ont ensuite été reprises dans des domaines plus sérieux.
Le monde de la course automobile sérieuse, professionnelle, a complètement intégré la dimension du simracing (simulation de courses automobiles).
Le simracing est utilisé pour l’entraînement des pilotes, l’entraînement des ingénieurs
La simulation est excellente. Elle permet d’essayer sur la piste des choses qu’on ne ferait jamais en vrai. Parce que ce serait dangereux, une perte de temps, et cela abîmerait du matériel.
L’exemple du Simracing
Les 24 heures du Mans virtuelles auxquelles a participé par exemple Fernando Alonso, se reproduisent maintenant d’année en année, et connaissent un énorme succès.
« L’événement est diffusé en direct sur Twitch et est bluffant à suivre. Des choses intéressantes se passent dans ce monde-là. Elles sont peu ou prou et petit à petit applicables à des mondes plus sérieux ».
En conclusion, nous voici rassurés, il nous reste du temps pour essayer de comprendre ce qu’est le metaverse. Comme tout reste à construire, l’avenir est radieux et il s’ouvre devant nous !
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