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Le livre qui démonte les mythes du marketing et que tout marketeur devrait avoir lu !

Les mythes du marketing sont nombreux et nombreux sont les marketeurs qui les récitent sans les comprendre. Il arrive parfois qu’un livre, une fois lu, change la perception que l’on a sur un sujet. De tels ouvrages peuvent être inspirants (Crossing the chasm, en 1992), d’autres critiques (comme Myths of innovation de Scott Berkun) et certains vous ramènent aux fondements du marketing. Le livre de Byron Sharp intitulé « How brands grow » (Oxford – 2010) fait partie de cette dernière catégorie. C’est un livre qui n’a malheureusement pas fait beaucoup de bruit, et parfois est considéré à tort comme un “délire verbal scientifique” . Je dois admettre que j’ai adoré ce livre, bien que certaines de ses conclusions m’aient parfois laissé perplexe. Je pense que cela conduira à plus de recherches sur le sujet, certaines conclusions présentées dans le livre étant surprenantes et contre-intuitives. Voici ce que j’en ai appris et ce que je voudrais partager avec vous.

Le livre qui démonte les mythes du marketing et que tout marketeur devrait avoir lu !

les mythes du marketing démontés par Byron Sharp
Pour Sharp, amarrer solidement un client ne l’empêche pas de dériver… D’où l’importance de chercher en permanence de nouveaux clients – un livre indispensable sur les mythes du marketing

Les marketeurs ont l’habitude de croire en leurs propres histoires, mais oublient souvent de vérifier les faits. C’est ce que Byron Sharp et l’Institut Ehrenberg ont fait et nous pouvons résumer ses découvertes de la manière suivante.

Le marketing démythifié par Byron Sharp

Mythe n° 1 : la loyauté du client importe plus que l’acquisition de nouveaux clients

Combien de fois entend-on qu’il est plus rentable de garder ses clients existants plutôt que de chercher à en acquérir de nouveaux ? Sharp démontre que cela est faux. Ce taux d’attrition (ou churn) dépend essentiellement de la taille de votre base de prospects, et cette acquisition de prospects est d’importance primordiale. C’est ce que l’on appelle la loi de la double peine (double-jeopardy law en anglais) : « les ventes diminuent car il y a de moins en moins de clients qui achètent la marque de moins en moins souvent ». Cette loi s’applique à tous les pays, dans tous les secteurs. En conséquence de cette loi de la double peine, il n’est pas moins cher de retenir ses clients existants que d’en acquérir de nouveaux. L’acquisition n’est pas une option : elle doit être une priorité pour la marque. De quoi rendre furieux certains experts du CRM…

Mythe n°2 : les gros clients sont importants, pas les petits

C’est faux. Une base de prospects est constituée de quelques gros acheteurs et une minorité de petits acheteurs. Mais la masse de ces petits acheteurs fait d’eux une catégorie très importante. Ce sont eux que la marque doit convaincre encore et encore si elle veut réussir. Sa démonstration de l’importance pour Coca Cola des consommateurs qui – comme moi – n’en boivent que véritablement occasionnellement est particulièrement éloquente et convaincante. Il faut s’attacher aux chiffres et non aux apparences.

Mythe n°3 : le ciblage est efficace

Je dois admettre que ce point est déconcertant. Sharp indique qu’en dépit des efforts des marketeurs d’essayer de se différencier au travers du « ciblage », les marques finissent par s’adresser à une clientèle « normale » censée être interchangeable. Ceci est censé s’appliquer, encore une fois, à toutes les catégories et tous les pays. Pourtant, tous les produits ne peuvent pas être achetés par tous (par exemple, les produits de luxe). Sharp pense que les segmentations à l’intérieur d’une sous-catégorie n’existe pas. Elle peuvent néanmoins exister entre plusieurs sous-catégories. Ce point-ci mérite, je pense davantage de recherches.

Mythe n°4 : la cannibalisation est une mauvaise chose

D’après Sharp, c’est même l’inverse ! Ce qui importe ici, ce n’est pas que les marques soient différentes, mais qu’elles soient distinctes (c’est à dire reconnaissables).

Mythe n°5 : les consommateurs ont des marques préférées

Sharp affirme que c’est exactement le contraire. On a tendance à favoriser ses propres choix ; une sorte de post-justification de ses propres achats (j’ai acheté ceci, donc je l’aime ; ou j’avais l’habitude d’acheter cela, etc.). Ce point s’applique aussi aux marques iconiques comme Apple et Harley-Davidson, selon lui. Essentiellement, il veut dire que les clients par exemple d’Apple ne sont en aucune façon plus loyaux que des clients PC.

Ce chapitre est probablement le plus difficile à vous vendre. Il y a tant de frénésie autour des produits d’Apple (surtout en ce moment où leur part de marché augmente du fait de l’absence de bons produits dans le monde du PC par exemple) que le marché en devient irrationnel. Sharp a certainement raison, mais la preuve qu’il utilise pour construire son argumentation est obsolète, l’énorme succès d’Apple ayant récemment mis de nombreuses entreprises en difficulté (Nokia, Sony Ericsson pour nommer quelques-uns, sans oublier HP qui a retiré sont PC de poche du marché – marché qu’il dominait il y a quelques années, et la liste n’est pas finie, avec Samsung qui a perdu la clé de l’innovation et copie Apple, l’image de marque en moins). La preuve donnée ici est également discutable. Ce chapitre nécessite donc un peu plus d’investigation, bien que Sharp ait indiscutablement mis le doigt sur quelque chose.

Mythe n°6 : la règle des 80/20 s’applique toujours

Ceci n’est pas un mythe en soi, mais les nombres ne correspondent pas tout à fait. Sharp, sur la base de nombreux cas, démontre que la Loi de Pareto s’applique bel et bien, mais que les chiffres basés sur l’observation sont proches de 50 % pour la plupart des marques et n’atteignent jamais 80 %. Ceci renforce l’idée selon laquelle il est nécessaire d’acquérir davantage de clients.

selon le principe de Pareto, environ 80 % des effets sont le produit de 20 % des causes... L'avis n'est pas partagé par Sharp.
Parmi les mythes du marketing le célèbre principe de Pareto, environ 80 % des effets sont le produit de 20 % des causes… Sharp n’est pas du même avis.

Mythe n° 7 : la publicité ne vend pas

Sharp montre qu’au contraire, la publicité a un véritable impact (et notamment sur le long terme) sur les ventes… A condition que votre produit soit assez distinctif et que vos campagnes suivent quelques principes parmi lesquels :

  • être universelle
  • pas d’interruption
  • la publicité doit avoir un lien clair avec la marque
  • facilement reconnaissable

Mythe n° 8 : les promotions augmentent les ventes sur le long terme

Ceci est clairement contre-intuitif. En effet, les promotions sont efficaces pour booster les ventes. Les recherches menées par Byron Sharp montrent cependant que les promotions n’ont pas ou peu d’effet sur les ventes à long terme. Sharp ne voit pas l’intérêt de maintenir les promotions, en dehors d’entretenir la relation avec les détaillants. Et pan dans le nez du hard discount !

Mythe n° 9 : les programmes de fidélisation sont efficaces

En réalité, les programmes de fidélisation fonctionnent, mais leur impact sur la fidélité est minimal et dans certains cas, les marques ne verront le bénéfice engendré, pour plusieurs raisons externes. Mon ami Christophe Benavent (de l’Université de Nanterre) a longtemps défendu l’idée que les programmes de fidélisation ne fonctionnent pas. Il est d’ailleurs logiquement cité dans le livre de Byron Sharp car il est un des spécialistes mondiaux de ce sujet.

On peut avoir le sentiment que les conclusions pourraient être différentes si l’on regarde les compagnies aériennes par exemple, ou une entreprise comme AMEX qui a construit son image distinctive sur son programme de fidélisation (j’ai moi-même une carte AMEX que j’utilise pour tous mes achats avec la plus grande irrationalité : je désire en effet accumuler des “miles” mais je me rends compte que depuis 2009 je n’ai jamais vérifié ni même calculé combien j’en avais gagné ni ce que cela m’avait rapporté) mais la preuve doit être apportée avant de faire une conclusion trop hâtive.

Au final, j’ai apprécié l’approche de Sharp qui est basée sur des faits, plutôt que sur de la fiction. Bien que certaines conclusions parmi les plus contre-intuitives gagneraient à être approfondies et mises à jour. Je vous conseille vivement d’acheter et de lire ce livre et de vous faire vous-même votre propre opinion.

Yann Gourvennec
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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »

7 commentaires

  1. Merci Yann pour se rafraîchissement utile – J’ajouterai un constat diablement persistant et diabolique lui même : les commerciaux paresseux qui attendent que le téléphone sonne sont nombreux. Pire, de nombreuses entreprises investissent dans des opérations marketing couteuses (salons, campagnes de phoning, campagnes emailing, publicités presse papier ou en ligne, etc…) et les commerciaux ne travaillent pas les leads générés (ou détectés), quand ce n’est pas le service marketing qui a un défaut pathétique de gestion des leads… (c’est du vécu).

    1. Merci Jean-Philippe, Ils sont paresseux … ou très en avance sur leur temps. Les adeptes du inbound marketing le savent. Et avouons que c’est bien agréable d’entendre le téléphone sonner !

  2. Bonjour et merci pour cette analyse. Je n’ai pas lu ce livre et j’ai, comme vous, quelques doutes sur certains Mythes. J’avoue ne pas avoir compris le N°4, sur la canalisation. Je « n’achète » pas le N°5 sur la fidélité aux marques. Votre exemple Apple est criant et les exemples de marques cultes ne manquent pas : Harley Davidson – que vous mentionnez – Sony, Ralph Lauren, Adidas… Il y a de ça plusieurs générations, on était Citroëniste ou Renaultiste… Enfin je partage le dernier sur les programmes de fidélisation qui, par définition, devraient accroitre la fréquence de visite des clients. Or, aucune enseigne, aucune marque n’a donné des chiffres qui le prouveraient. Tout ce qu’elles nous disent est que le client porteur de carte achète plus. Ce sont dons des tactiques (toutes similaires sinon identiques) de captage de clientèle destinées à éviter que le consommateur soit tenté d’aller voir ailleurs. Ce que, au siècle dernier, salons de coiffure et blanchisseries avaient bien compris avec leur carte à tamponner qui vous donnait droit à une prestation gratuite au bout de 10 payantes. Et aujourd’hui, le succès de Groupon (malgré certains couacs) s’explique par le fait qu’il s’agit d’un programme d’infidélité destiné aux chasseurs de primes dont la seule motivation d’achat ou de visite est la réduction de -50%. Cordialement. Thierry Poupard consultant marketing restauration

    1. Merci Thierry de ce retour.
      J’ai été un peu succinct sur la cannibalisation. Ex : P&G est maître de la cannibalisation et ils occupent tout le marché en se concurrençant eux-mêmes. Idem pour tous les lessiviers, qui ne sont que 2 ou 3 (Henkel/P&G/Unilever). OK pour le 5 mais je vous conseille quand-même de lire ce livre et de vous faire une idée par vous-même. Pour une fois qu’on a droit à un livre de marketing qui n’est pas basé sur des « on-dit » …

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