marketing digital

Net neutralité : la fin d’Internet pour tous ?

NDLR : Benedetta est une élève de 3ème qui a passé une semaine chez Visionary Marketing dans un stage de découverte du monde de l’entreprise. Dans le cadre de ce stage, je lui ai demandé d’utiliser ses capacités linguistiques (elle est italienne et parle couramment 3 langues) afin de dresser un panorama de la net neutralité au travers de la presse italienne, anglaise et francophone d’Europe. Malgré son jeune âge, elle a 14 ans, Benedetta a fait montre d’une grande maturité et son analyse d’un sujet pourtant extrêmement complexe, est pertinente et intéressante. J’ai donc décidé de publier son article pour le bénéfice de nos lecteurs.

Les USA étant un des pays les plus puissants au monde, la décision du gouvernement Trump au sujet d’Internet va-t-elle influencer l’Europe et le reste du monde ? Je me suis intéressée à la manière dont la net neutralité est abordée dans différents pays : France, Grande-Bretagne, Italie, Belgique et Suisse.

Qu’est-ce que la net neutralité ?

net neutralité
Qu’en sera-t-il demain de l’Internet que nous connaissons aujourd’hui ?

La net neutralité permet d’assurer que tout le trafic sur Internet soit traité de la même manière et donc de faire en sorte que les fournisseurs d’accès à Internet ne fassent pas de favoritisme par rapport aux contenus qui passent dans leurs « tuyaux ». Les blogs et les journaux semblent se focaliser sur ce point après l’action de l’administration Trump, qui a décidé de supprimer cette neutralité aux États-Unis. Le Figaro a même appelé cela « Cadeaux de Noël aux géants des télécoms ». Mais pourquoi exactement ?

Cette décision a en effet favorisé les intérêts des FAI (Fournisseurs d’Accès Internet) comme Verizon, AT&T et Sprint, car depuis le 14 décembre 2017 les fournisseurs d’accès Internet américains ont le droit de favoriser le trafic d’entreprises qui ont les moyens de payer et de laisser toutes les autres sur une voie lente, créant ainsi un réseau à deux vitesses. Verizon a cependant déclaré qu’il n’utiliserait pas ce droit.

Les petites entreprises et les startups qui n’ont pas les moyens de payer risqueraient donc d’être un jour désavantagées et peut-être même d’être écrasées par les puissantes industries multimilliardaires, car il n’y aurait plus de liberté de concourir. Pour nous citoyens, à supposer qu’une décision similaire puisse s’appliquer à l’Europe, cela indiquerait une hausse des tarifs des abonnements comme par exemple celui de Netflix.

Du fait de la suppression de la net neutralité, les FAI seraient potentiellement en condition de pouvoir contrôler ce que nous lisons en tant qu’internautes, puisqu’ils pourraient choisir les contenus à nous mettre à disposition. Le journal suisse Le Temps a appelé cela « risque de censure ». Mais la censure est directement reliée à la liberté de parole et si Internet subit des censures, il n’y aura plus de liberté de parole. Qu’en sera-t-il demain de l’Internet que nous connaissons aujourd’hui ?

Nous sommes déjà chaque jour influencés par le pouvoir d’Internet, les informations qu’il nous fournit. Si quelqu’un a le pouvoir de contrôler les contenus que nous lisons, il a également le pouvoir de nous influencer.

Le niveau de conscience des Européens

net neutralité
Du fait de la suppression de la net neutralité, les FAI seraient potentiellement en condition de pouvoir contrôler ce que nous lisons en tant qu’internautes.

Qu’en est-il du niveau de conscience des Européens vis-à-vis de ces évolutions de la net neutralité ? Une étude du BEREC (Body of Europeans Regulators for Electronic Communication), basée sur des statistiques issues de quatre pays Européens (Suède, Croatie, Grèce et République Tchèque), a démontré que les citoyens de notre continent ne connaissent pas assez cet argument pour en débattre. Probablement parce qu’il s’agit d’un argument qui est très sous-estimé par les utilisateurs et qui est donc ignoré.

Les divers gouvernements prennent des précautions au niveau des lois pour sauvegarder la neutralité du réseau.

En France la neutralité est protégée par une loi européenne transposée dans la loi pour une République numérique. De plus l’Arcep (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes) est chargée d’assurer son respect.

En Italie, la présidente de la Chambre, Laura Boldrini, a défini l’abolition de la net neutralité aux États-Unis comme un fait « grave ». Dans ce pays il existe aussi une Déclaration des Droits d’Internet depuis 2015, qui comprend 14 articles. Le journal La Stampa affirme que cette bataille sera longue, mais que ce seront les citoyens américains qui en subiront les conséquences immédiates.

En Belgique le contrôle de la conformité aux règles d’Internet est assuré par l’IBPT (Institut Belge des services Postaux et des Télécommunications), qui a affirmé :« Il n’y a pas de sérieux motifs de préoccupation en Belgique sur le plan d’accès à un Internet ouvert »

En 2013, en Suisse Balthasar Glättli avait exprimé dans une interview au journal suisse 24 Heures son sentiment de devoir ancrer la net neutralité dans la loi, affirmant que déjà pour 20% des utilisateurs la neutralité était violée.

La BBC affirme que les changements aux États-Unis n’affecteront pas directement les utilisateurs hors de ce pays, mais cela soulignera encore plus les différences philosophiques entre la manière Américaine et la manière Européenne de traiter les droits digitaux. La Grande-Bretagne ne craint pas ces changements grâce aux lois européennes créées en 2016. « Nous devrons rester vigilants à ce que les règles de la net neutralité ne soient altérées après le Brexit » déclare Johnson-Williams.

Un débat qui débute en Amérique

net neutralité
Les fournisseurs d’accès Internet américains ont le droit de favoriser le trafic d’entreprises qui ont les moyens de payer et de laisser toutes les autres sur une voie lente.

La net neutralité est un principe fondateur d’Internet, qui existe depuis les années 90, mais qui n’était pas encore rédigé. L’administration Obama en 2005 avait déjà commencé à prendre des résolutions pour concrétiser le concept de neutralité du réseau. Le successeur d’Obama, Donald Trump a décidé de rejeter le travail commencé par son prédécesseur.

C’est pour cela qu’Ajit Pai, directeur de la FCC et ancien chez Verizon, a pris la décision le 14 décembre 2017 de supprimer cette neutralité pour laquelle les gouvernements du monde entier s’étaient tant battus auparavant, et qui lui coûte maintenant des lourdes menaces d’après Les Echos.

En effet il ne faut pas oublier que le débat pour la neutralité du réseau n’est pas une chose récente. En 2008 un livre appelé « The future of Internet and how to stop it » a été écrit par Jonathan Zittrain par rapport à cet argument. Il date maintenant de 10 ans, mais il parle d’un sujet qui peut sembler tout à fait d’actualité.

 

En conclusion, devons-nous craindre de voir l’Internet disparaître ? Les gouvernements d’Europe ont cherché à se protéger des possibles influences provenant des États-Unis en se dotant, pour la plupart, des lois. Le niveau de conscience et de connaissance des européens par rapport à ce sujet est extrêmement faible. La plupart du temps les journaux affirment que l’action de Pai ne devrait pas avoir de conséquences néfastes pour l’Europe, et on peut donc en déduire que les européens se considèrent à l’abri, mais il ne s’agit que d’une supposition.

WWW est l’abrégé de ce qui en anglais donne « World Wide Web », donc Internet est un réseau qui relie le monde entier. A ce titre, il est le bien commun de l’humanité toute entière. Combien de temps pourrons nous le préserver, au vu d’une si faible acculturation de nos peuples à l’importance de sa neutralité ?

Les derniers articles par Benedetta Reschini (tout voir)

Benedetta Reschini

Benedetta is originally from Bologna in Italy and spent her third-year internship at Visionary Marketing
Bouton retour en haut de la page