marketing digital

Web to store : le bon vieux catalogue papier survivra au digital

Des technologies qui ont récemment débarqué dans le grand public (notamment grâce à la généralisation du smartphone) comme la réalité virtuelle et la géolocalisation, offrent de nouvelles perspectives au Web to Store. Cependant, bien qu’il faille qu’une entreprise vive dans son époque, elle ne doit toutefois pas être trop en avance et abandonner ce qui fonctionne pour miser sur une technologie qui n’en restera peut-être qu’au stade d’expérimentation. C’est ce que pense Matthias Berahya, PDG de Bonial, qui, à l’instar de la cohabitation entre la télévision et la radio, ne voit pas le catalogue digital remplacer le catalogue papier, pour la simple et bonne raison qu’il s’agit de deux stratégies digitales différentes. 

Vous avez fait une annonce de centre commercial virtuel : la réalité virtuelle va t-elle révolutionner la vente ?

C’est pour l’instant encore un projet de recherche. Il faut être conscient que la réalité virtuelle est une technologie encore extrêmement jeune et qu’à ce stade, ce n’est pas encore une technologie grand public. Si Bonial a décidé d’investiguer dans cette direction, c’est que nous avons vécu il y a quelques années  la transformation mobile. Le mobile, qui n’était au début qu’une expérience, représente désormais environ deux tiers de nos revenus : l’entreprise en entier est tournée vers le mobile.

On ne pouvait pas donc ignorer une technologie comme la réalité virtuelle qui pourrait devenir, en tout cas selon certains grands « gourous », la prochaine technologie grand public. A ce stade ce n’est pas le cas. Mais c’est important d’apprendre et d’être dans les premiers à maitriser cette technologie afin d’être prêt à son explosion.

A quoi sert cette vision 3D à 360° ? A faire comme Dior dans ses magasins, avec l’expérimentation digitale ?

Effectivement, cette technologie permet de se promener dans un show-room virtuel. Nous avons essayé de reproduire ce que nous faisons déjà sur notre application mobile, à savoir réunir une place de marché, un catalogue, des offres et les promotions des distributeurs. C’est un peu similaire dans la réalité virtuelle : on se promène dans différents show-room où l’on peut découvrir les offres et les promotions de différents distributeurs, de manière virtuelle. On peut ainsi manipuler certains produits, voir les détails, les offres relayées dans les catalogues, et ajouter des produits à une liste de courses qui se transfert sur le smartphone, lequel peut guider vers le magasin physique pour y réaliser ses achats.

La réalité virtuelle trouve également beaucoup d’applications dans la culture.

Il y a en effet beaucoup d’applications à la réalité virtuelle. La culture est un bon exemple pour les visites de musée. Concernant les jeux, il est évident que cela sera une structure majeure pour ce segment, je pense également à la presse avec des interactions qui peuvent être très différentes sur des formats de reportage où l’on va se promener de manière virtuelle dans certains endroits.

Il y a quelques exemples aujourd’hui sur YouTube, par exemple avec Le Parisien qui a réalisé des vues de certaines villes en guerre de Syrie qui sont saisissantes et que l’on peut voir pas seulement avec Oculus Rift, mais surtout avec Cardboard qui est un dispositif low-cost : les résultats sont déjà impressionnants, en matière réalité virtuelle.

Vous avez également mis en place une mesure du ROI par géofencing.

Le métier de Bonial est de diffuser des catalogues et des prospectus sur des applications mobiles, et l’une des grandes questions des annonceurs est de savoir si effectivement, après lecture de ces catalogues, de ces promotions qui sont des publicités, les gens se rendent ou non en magasin. C’est une question à laquelle Bonial peut désormais répondre avec par une méthodologie qui nous permet de quantifier la hausse de trafic en magasin en comparant un groupe de gens qui ont été exposé à ces catalogues digitaux, qui les ont vu dans la dernière semaine et les gens qui ne l’ont pas vu. C’est en comparant le groupe exposé et le groupe non exposé que l’on mesure l’incrément de traffic dû à l’exposition au catalogue digital.

Dans quel secteur cela peut-il se pratiquer, et dans quelles proportions ?

Cela fonctionne à peu près dans tous les secteurs du retail. On savait que le catalogue papier a toujours été un grand vecteur de trafic et on sait désormais le mesurer sur le digital. On mesure à peu près dans la distribution alimentaire des hausses de trafics autour de 70%, ce qui est déjà considérable, avec des pics mesurés chez certains acteurs particulièrement actifs en promotion à la fin de l’année 2015. Leclerc notamment, qui a fait quelques très bonnes opérations, en particulier avec les « super-pouvoirs d’achat » (voir ici l’événement) où l’on a mesuré des pics d’augmentation de trafic de 112% à 115% si mes souvenirs sont bons, c’est-à-dire que la fréquence de visite du groupe a plus que doublé.

Cela fonctionne t-il également pour les meubles ou des machines à laver ?

Cela peut même très bien marcher. On l’a constaté chez certains distributeurs, notamment dans la décoration et dans les bazars : on peut trouver chez certains distributeurs de petites choses sympas à acheter, c’est pareil dans les catalogues. Sur ces produits, on peut mesurer des hausses de 150% à 250% sur certaines campagnes. La nouveauté est que Bonial peut le mesurer par semaine et par distributeur.

Est-ce qu’il y a possibilité de comparer l’exposition au papier par rapport au catalogue dématérialisé ?

Peut-être pas par cette méthode-là : l’exposition au papier a fait l’objet d’autres méthodes, qui sont déclaratives. Elles sont assez souvent administrées après quelques jours de diffusion des catalogues papier. On a également fait ces mesures pour Bonial dans des protocoles similaires : on trouve en général que le catalogue digital est plus performant que le catalogue papier. La raison à cela est que les gens sélectionnent les contenus qu’ils ont envie de consulter cette semaine, parmi les 100 ou 150 catalogues qui peuvent être présents sur la plateforme. Et ce marketing pull, ce fait de choisir ce contenu, fait toute la différence et se retrouve logiquement dans les chiffres.

Peut-on évaluer cette différence ? 

Nous n’avons pas les mêmes chiffres côté papier, c’est difficile de chiffrer. En revanche, ce qu’on sait évaluer, c’est le coût au contact, qui est une métrie commune aux deux. On estime que selon le secteur, le catalogue digital est entre trois et cinq fois moins cher qu’un coût au contact papier de même qualification.

Le sort du catalogue papier est-il réglé ? Beaucoup utilisent d’ailleurs une étiquette « stop pub » montrant une certaine réticence par rapport à ces catalogues.

Bonial s’est intéressé aux étiquettes « stop pub » à la fin de l’été dernier : on a mesuré qu’effectivement, 18% des français aujourd’hui en a une et 14%  souhaitent en poser une. Donc on a à peu près 1/3 des français qui peut être considéré comme réfractaire au catalogue papier.

Pour autant, une bonne partie de la population l’apprécie encore énormément, parce que ces catalogues contiennent chacun 15 milliards de réductions et promotions diverses. Il y a donc beaucoup de français ayant à cœur de le trouver dans leur boite aux lettres. Je pense que la transition entre le papier et le digital ressemble un peu à la transition entre le nucléaire et les énergies renouvelables. On aimerait ne faire que des énergies renouvelables,  c’est souhaitable, plus efficace, moins cher… Mais ce n’est pas possible tout de suite. Parce que la centrale nucléaire fournit encore une puissance importante pour les opérations. Donc ces transitions sont bien sur le long terme et normalement le marketing pull, qui est celui du catalogue digital, doit progressivement prendre le pas sur le marketing push qui est celui du papier.

Les utilisateurs du catalogue digitalisé sont-ils différents de ceux du catalogue papier ? 

On trouve aujourd’hui comme sur tous les supports digitaux et les Apps mobile une population un peu plus jeune que la moyenne des consommateurs, et des lecteurs des catalogues papier. C’est encore une fois un résultat qui est relativement constant sur les médias digitaux, en particulier sur le mobile, et c’est une manière de communiquer sur un canal différent qui s’adresse à un public différent, à des gens plus jeunes qui peuvent être des publics très stratégiques pour les enseignes, qui sont des familles et des foyers, souvent avec les enfants, et qui sont des cibles importantes à travailler.

À terme, le papier va t-il disparaitre ?

Je ne pense pas qu’il disparaitra, en tout cas, pas à moyen et à long terme. J’ai même des doutes, parce que le papier possède un type de marketing que l’on appelle push, je l’ai dit tout à l’heure, qui pour moi vient plutôt après pull en termes d’efficacité, mais sert quand même à des objectifs de notoriété dont tous les annonceurs ont régulièrement besoin au même titre que la télévision et la radio. On peut d’ailleurs faire une autre comparaison  que celle de la télévision et de la radio. Quand la télévision est apparue, on s’est dit : « on a l’image, je ne sais pas pourquoi la radio aurait vocation à rester ». En réalité, on voit bien qu’on utilise la radio dans un autre contexte et que les deux supports cohabitent. Cette cohabitation va se faire également entre le catalogue digital et le catalogue papier.

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Cédric Jeanblanc

Cédric is a Web Marketing consultant at Visionary Marketing. He was named "Rising Star of Content Marketing" by the Content Marketing Academy in 2017, he specializes in the production of multimedia content, feature articles, videos and podcasts. _________________________ Cédric est consultant en marketing Web chez Visionary Marketing. Il a été nommé "Rising Star of Content Marketing" par la Content Marketing Academy en 2017. Il est spécialisé dans la production de contenus multimédia, d'articles de fond, de vidéos et de podcasts. More »

5 commentaires

  1. « Le Papier n’est pas mort » : Quel manque de vision ! C’est très inquiétant de voir un tel décalage entre le discours et la réalité. Le papier est archi-mort. Ce n’est pas parce que les prospectus sont déposés dans les boites aux lettres qu’ils sont lus. C’est un combat d’ancienne garde, qui va s’arrêter aussi discrètement que les pages jaunes, et personne ne le regrettera.

    1. Merci de votre visite et de votre commentaire. Il a le mérite de la franchise et d’être direct et nuancé.
      Je le transmets à Matthias qui se fera un plaisir de vous répondre sur le fond.

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