économie et numérique

La Chine s’est éveillée : zoom sur l’Internet chinois en 2018

Depuis la fin des années 90, le marché de l’Internet chinois a connu une croissance exponentielle et une évolution très rapide. En une vingtaine d’années, la Chine est devenue un leader mondial de la transformation numérique. Cependant, le paysage numérique chinois est assez différent du paysage occidental. Dans cette interview de Chunyan Li, nous allons essayer de comprendre ce marché intrigant.

La Chine s’est éveillée : zoom sur l’Internet chinois en 2018

Internet chinoisTout d’abord, le nombre total d’internautes chinois a dépassé la population de l’Europe, à savoir 772 millions en décembre 2017, soit 56% de la population chinoise. La Chine est également leader du paiement mobile. En 2016, le volume en dollars des transactions mobiles était déjà 11 fois supérieures à celui des États-Unis. À côté de ça, la Chine est également devenue un acteur important du commerce électronique et du « New Retail ». De plus, la Chine est sur le podium mondiale pour l’investissement de capital-risque dans certaines technologies clés, telles que la réalité virtuelle, l’IA et le Deep Learning, la conduite autonome, la robotique et les drones, l’impression 3D, le Big Data, etc.

Deuxièmement, le marché numérique chinois est un système indépendant, au fonctionnement bien différent de notre modèle occidental. En Chine, nous avons une grande variété d’activités numériques, mais la censure gouvernementale nous empêche d’accéder à Google, Facebook, Twitter, Youtube, etc. Il y a donc beaucoup d’acteurs locaux, ce qui rend le marché intérieur ultra compétitif.
En effet, nous avons une version chinoise correspondant à chaque plate-forme occidentale, par exemple : Baidu remplace Google, Renren et Kaixin remplacent Facebook, Weibo remplace Twitter, Youku remplace Youtube, etc.
Concernant le E-commerce, E-bay et Amazon ont accès au marché chinois, mais ils sont bien moins compétitifs qu’Alibaba et JD.com.

Troisièmement, la vie quotidienne des Chinois ainsi que leurs décisions d’achat sont très impactées par les médias sociaux. Weibo et WeChat sont les réseaux sociaux chinois préférés des entreprises pour la promotion de leurs marques, produits ou services. Aujourd’hui, ils réunissent respectivement 400 millions et 1 milliard d’utilisateurs actifs mensuels. Sur ces plates-formes, il est bien plus facile d’agrandir sa communauté ou d’obtenir plus de clics. YAO Chen, par exemple, une actrice chinoise très populaire, compte plus de 80 millions de followers sur Weibo – plus que les populations française et belge réunies.

Quatrièmement, le marché numérique chinois est assez « mobile » et principalement axé sur les applications. Près de 98% des internautes chinois sont mobinautes : ils se connectent chaque jour à internet via un smartphone. C’est 20% de plus que la moyenne mondiale. Le mobinaute chinois a en moyenne 40 applications téléchargées sur son téléphone portable.

Enfin, le jeune public chinois est hyper connecté à internet et particulièrement aux réseaux sociaux. Un Chinois passe en moyenne 3 heures par jour sur son smartphone. Il est devenu courant que deux personnes s’assoient à la même table sans même se regarder, les yeux rivés sur leur écran.
Prenons l’exemple de WeChat : le temps moyen passé sur ce réseau est de plus d’une heure par jour ; c’est devenu une sorte de style de vie pour les Chinois : on l’ouvre en même temps que ses yeux le matin et on vérifie avant de s’endormir. WeChat intègre également la fonction de paiement électronique et peut parfois remplacer un portefeuille pendant plusieurs semaines !

Le marché numérique est devenu très compétitif en Chine. Comment les marques occidentales ou française pourraient-elles réussir leurs campagnes e-marketing en Chine ?

Tout d’abord, trouvez ce qui vous différentie et racontez une belle histoire. Un contenu unique et intéressant est essentiel pour attirer l’attention des consommateurs chinois. S’il est innovant c’est encore mieux ! Il vous faut donc le mettre régulièrement à jour, que ce soient des textes des images ou du contenu vidéo.

En voici un bon exemple : en 2013, Coca Cola lance sa campagne « Nickname bottle ».  Cette bouteille personnalisable portait votre prénom. En parallèle, il y avait une série d’étiquettes avec plus de 50 mots amusants appréciés des internautes : « Da Ga » (=VIP), « Gui Mu » (= mon meilleur ami), « Fen Si » (= fans), « Chi Huo » (= quelqu’un de très avide de nourriture), etc.
Ainsi, chaque consommateur pouvait « s’identifier » à travers ces qualificatifs sur les étiquettes rouges. Cette campagne a attiré beaucoup d’attention en ligne. Elle a été d’autant plus accentuée que plusieurs star chinoises et autres leaders d’opinions y ont participé. En seulement deux mois, Coca Cola a augmenté ses ventes en Chine de 20% par rapport à la même période l’année précédente.

Dans un second temps, il vous faut renforcer l’interaction avec les utilisateurs. Vous les encouragerez à participer aux campagnes en ligne et à créer un bouche-à-oreille. Un bon exemple de réussite en ce sens est la campagne « De Londres à Shanghai » lancée par Burberry en 2014. Elle a en effet permis à Burberry d’obtenir une interaction très dynamique avec les internautes chinois. Les utilisateurs devaient secouer leur téléphone pour effacer la brume matinale et ainsi accéder aux pages ou photos suivantes, jusqu’à la destination finale : Shanghai.
Un autre exemple ; lors du nouvel an chinois 2018, Mulberry proposait aux utilisateurs de WeChat de créer des calligraphies numériques sur le thème du printemps. Certaines marques comme Gucci ou Louis Vuitton ont également créé leurs propres « stickers » que les utilisateurs chinois pouvaient utiliser pour illustrer leurs conversations sur WeChat.

 

 

Troisièmement, créez le « lien émotionnel ». SK-II, une marque de cosmétiques japonaise, à lancé en 2016 une campagne en ligne sur les « leftover women ». En Chine, les « leftover women » sont défini comme des femmes célibataires âgées d’au moins 27 ans. La vidéo ne dure que 4 minutes mais a été très touchante et a créé beaucoup de résonance émotionnelle chez les femmes chinoises célibataires. Quelques jours après sa publication, la vidéo à atteint plus de 20 000 vues sur son compte officiel Sina Weibo et plus de 100 000 vues sur WeChat !

Quatrièmement, il vous faut engager les principaux leaders d’opinion. Ils ont beaucoup d’influence sur les décisions d’achat des consommateurs chinois. Ce peut être des actrices, des chanteurs ou des bloggeurs dans des secteurs spécialisés comme la gastronomie, e tourisme, etc. Néanmoins, leur contribution directe aux ventes est encore difficile à évaluer.
Si vous ne pouvez pas vous offrir un influenceur, passer plus de temps à créer un contenu de qualité régulière.

Cinquièmement, il vous faut combiner les forces et les stratégies « on line » et « off line » pour offrir la meilleure expérience utilisateur – nous l’appelons O2O (Online to offline) ou encore « new Retail ».
Par exemple, lorsque vous organisez un événement en ligne, tel qu’un jeu ou une compétition, vous pouvez encourager les participants à se rendre au magasin physique le plus proche pour recevoir leurs récompenses.

Enfin, Prenez en compte la culture locale. Son intégration dans les campagnes en ligne vous permet d’effectuer une bonne approche. Lors du nouvel an chinois 2018, de nombreuses marques ont lancé leurs campagnes en ligne, comme Chanel, Fendi, Christian Dior, Giorgio Armani …
Un bon exemple est la campagne 520 de cartier sur WeChat. En chinois, 520 se prononce comme « je t’aime », Cartier en a donc fait une vidéo publiée le 20 mai 2017 (05/20).

Ernest Margerie
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Ernest Margerie

Ernest a été consultant junior en Web Marketing chez Visionary Marketing en 2018 et 2019. Il est diplômé du master en digital business de Paris School of Business (PSB)
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