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Vero et l’histoire des médias sociaux

Il pourrait sembler bizarre de s’intéresser à l’histoire des médias sociaux tant les deux termes paraissent contradictoires. Et pourtant, comme souvent en innovation, s’intéresser à l’histoire de la technologie permet de mieux comprendre les erreurs qu’on pourrait ou ne pas commettre. Alors, avant de vous exciter sur le dernier réseau social à la mode, revenons à cette histoire des médias sociaux pour mieux comprendre ce qui est en train de se passer sous nos yeux. 

Vero et l’histoire des médias sociaux

Vero et l’histoire des médias sociaux
Avec cette petite histoire des médias sociaux vous allez mieux comprendre ce qui se passe avec Vero.

Non, VERO n’est pas le petit nom de Véronique !

Vero et l’histoire des médias sociauxCela veut dire « VRAI » en italien. C’est d’ailleurs une proposition intéressante et ils n’hésitent pas à le mettre en avant en barrant « médias » et laissant « sociaux ».

L’engouement pour ce réseau social est intervenu dans les jours qui ont suivi l’inscription du réalisateur de blockbusters Zack Snyder.

Petite histoire des médias sociaux

Vero et l’histoire des médias sociaux
Zack Snyder s’est souvent vu reprocher une réalisation insipide (à l’exception notable de Watchmen), malgré une photographie soignée et novatrice. De jolis blockbusters un peu creux, comme le réseau social Vero ?

Il y a donc un écho pour les médias qui sont vraiment sociaux. Car nos médias sociaux sont devenus asociaux. Ils ne le sont pas devenus parce que les plateformes seraient mal intentionnées, mais je pense plutôt que les utilisateurs ne les utilisent pas comme ils le devraient.

La question qui revient toujours sur ces nouveaux médias sociaux c’est « est-ce que cela va tuer Facebook ? ». Spoiler : non, ça ne va pas tuer Facebook, et on voit avec Vero qu’au bout de quelques jours c’est déjà quasiment fini, les premières personnes ont ouvert un compte, puis le buzz s’est éteint.

On pourrait se poser la question de savoir pourquoi cela ne marche pas. L’inventeur du bouton « like » a lui-même créé une association destinée à provoquer la pause digitale et a demandé aux gens de d’arrêter d’avoir la tête dans les médias sociaux. C’est un comble quand c’est des gens qui nous ont mis sur les médias sociaux et nous expliquent qu’il ne faut plus y être.

1994 : la naissance du premier réseau social

Il est intéressant de regarder l’historique des médias sociaux. Tout le monde croit que cela date de 2004, d’autres pensent qu’ils sont encore plus récents. Souvent on me pose la question « qu’est-ce que vous faisiez en 2000 sur internet ? » : la même chose qu’aujourd’hui avec d’autres outils, parce qu’il y a toujours eu des outils collaboratifs sur internet. Il y a eu une préhistoire avant 1990 des médias sociaux hors internet. Les premiers sites Web sont arrivés dans le grand public vers 1992. Mais avant cela il y avait le Usenet par exemple en 1970 – 1980.  Ça remonte ! Les services en ligne ne datent pas non plus de 2004 : le premier service en ligne date de 1994, AOL distribuait des CD aux américains.

Vero

Il y a eu le fameux MSN en 1994 pour se connecter partout dans le monde. Citons également le fameux ICQ, moins utilisé en France. Après bien sûr il y a eu les premiers sites de rencontres, les forums que l’on a trouvé dès le début dès le début du web. Dans tous les médias sociaux, on retrouve le principe « les amis de mes amis sont mes amis » : dans cette veine, on trouve le site sixdegrees.com en 1997, mais également Friendster en 2002. Il y a également eu le fameux high five en 2003 plus centré sur les jeunes. LinkedIn est apparu en 2003, Myspace en 2003 (paix à son âme), puis Facebook ouvert au public en 2006, Orkut s’est développé au Brésil et en Inde (c’était la première tentative de Google, qui ne sera pas repris dans d’autres pays) Youtube en 2005, Twitter en 2006, Flickr en 2009…

Depuis 2010 : qui aura la peau de Facebook ?

En 2010 on a commencé à voir arriver des médias sociaux qui sont venu contrer les médias sociaux mainstream : est arrivé diaspora en 2010 sur lequel il y avait un fort espoir de le voir un jour remplacer Facebook, et qui a fait long feu avant de disparaître. Le fameux Google+, qui est né en 2011 et dont personne n’en voulait. Cela a mis six ans à mourir et n’est d’ailleurs pas officiellement mort (et ne le sera jamais annoncé officiellement). Google my business est cependant devenu un vrai succès. Il y a eu le réseau social de Microsoft : soc.cl. Les journaux ont dit au moment à sa fermeture : « So.cl était le réseau qui a fermé alors que vous ne saviez même pas qu’il avait ouvert ».

Il y a eu Snapchat en 2012, qui continue de bien marcher, puis App.net qui n’a pas rencontré le succès escompté, car le réseau social s’est rempli uniquement de techniciens. L’objectif était de tuer Facebook en évitant de traquer les utilisateurs et en étant respectueux : depuis 2010 on tourne autour de ce sujet-là et ça ne prend pas. D’ailleurs pour se connecter App, on pouvait utiliser son compte Facebook.

Quand l’histoire des médias sociaux éclaire la sortie de Vero

On ne peut plus créer de médias sociaux génériques

Il y a eu une tentative en 2014 avec ello qui s’est resserré sur une communauté de designers. On commence ici à à comprendre comment fonctionnent les médias sociaux. Les médias sociaux horizontaux ont pris leur place : Facebook pour les familles, Twitter pour les journalistes et les blogueurs (et la politique malheureusement) LinkedIn pour le B2B… Le fondateur de LinkedIn le disait déjà il y a au moins sept ou huit ans : on ne peut plus créer de médias sociaux génériques. Pourquoi ? Parce qu’il n’y a plus de place et les places sont chères.

Vero : l’exemple de ce qu’il ne faut pas faire

On en a vu d’autres tentatives : Mastodon a essayé de tuer twitter en 2016 (paix à son âme) et on a Vero en 2018. Vero est un bon exemple de ce qu’il ne faut pas faire. Voyons ici pourquoi.

Pour ce faire, je vais vous décrire le cas d’usage d’une plateforme collaborative sur laquelle nous avons travaillé en conseil et en accompagnement pour une jeune pousse qui est nommée FluksAqua et qui est donc centrée sur le B2B : on peut créer des médias sociaux verticaux très précis sur des communautés, ici une une communauté d’exploitants de l’eau et de l’assainissement. On est parti de zéro, car les membres de cette communauté — des électromécaniciens — ne sont pas sur LinkedIn ni sur Facebook ni sur Twitter, etc. Comment faire fonctionner ce réseau ? On va utiliser ce que l’on appelle la méthode du jardinier :

  • VeroPlanter : je vais amorcer ma communauté par cercles concentriques, c’est-à-dire du plus simple au plus compliqué. D’abord je commence par les gens qui sont le plus proche de moi, ici les électromécaniciens de Veolia puisqu’on les a devant les yeux, on peut facilement y accéder, donc c’est relativement facile. Puis je vais aller chercher le deuxième cercle, les gens qui sont un petit peu plus loin, puis de plus en plus loin, etc. Mais pour démarrer je vais utiliser les gens proches de moi et leur faire rentrer du contenu de façon à remplir ma plateforme. C’est exactement la même chose qui se passe chez Vero, il y a une personne influente qui s’appelle Zack Snyder, qui fait venir les autres.
  • VeroArroser : on va chercher davantage de contributeurs qui vont apporter du contenu au fur et à mesure : c’est là que Vero s’arrête.
  • VeroÉlaguer : on la rencontre sur Facebook en ce moment avec les Fake News car trop de gens sont là et font n’importe quoi : il faut faire la police. On l’a vécu avec Wikipédia dans le passé.

Pour résumer, Vero n’est même pas à l’arrosage : ils ont fait venir Zack Snyder (1ere étape), puis tous les geeks sont rentrés (premier cercle concentrique) et il faut ensuite que le grand public arrive, mais il n’arrive pas. Parce que l’on a oublié les fondamentaux du travail en communauté. Et une communauté, c’est :

  • Des intérêts communs
  • De l’entraide
  • Des bénéfices mutuels

Sans promesse tenue, pas de confiance

Voilà le premier problème quand on arrive sur Vero. Il y a une interface plutôt sympa, mais le problème est qu’il faut un bénéfice pour aller sur Vero : qu’est-ce que cela m’apporte ? Qu’on ne va pas me tracker? Oui mais cela ne suffit pas. Les gens sont sur Facebook et se font tracker, ils grincent des dents mais en même temps ça leur apporte un peu de plaisir car ils peuvent regarder des lolcats et ont un bénéfice car beaucoup de gens en postent. Sur Vero, personne ne poste de lolcats car ils ont raté la phase d’amorçage, il n’y a aucun bénéfice à être dessus, il y a juste quelques geeks. Même si l’on a barré médias parce qu’il n’y a pas de pub, on voit des publicités sur la page de la page d’accueil de Vero… Et là on ne comprend plus parce qu’il y a une différence entre la promesse et la réalité.

Il y a de la publicité, donc il y a de la suspicion, et la promesse de départ est morte. Je pense donc que Vero se refermera, comme App.net, sur une micro communauté. Espérons que le prochain réseau social qui voudra remplacer Facebook saura tirer parti de ces échecs et demi-succès pour proposer une expérience véritablement sociale.

Yann Gourvennec
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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »
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