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Casser les silos : le plus grand mythe de la transformation digitale

Il faut « casser les silos !» Si vous n’avez pas entendu cette antienne un million de fois, c’est que vous n’êtes jamais sortis de chez vous. Car c’est sans doute le plus grand mythe sur la transformation digitale, et non digitale. En 2015, une présentation réalisée dans les locaux de Visionary Marketing sur le sujet du travail entre le marketing et la DSI avait donné lieu à un article intéressant dans les Échos. Celui-ci était intitulé « selon Yann Gourvennec, le Chief Digital Officer, c’est pour la Comm… ». Hélas, cet article avait déformé mes propos. Je n’ai jamais glorifié les « silos». Et d’expliquer ci-dessous pourquoi l’intrapeneuriat apporte une réponse intéressante à ce dilemme. Et surtout, une réponse plus efficace.

Casser les silos : le plus grand mythe de la transformation digitale

Casser les silos : le plus grand mythe de la transformation digitale
Casser les silos organisationnels. Une vieille chimère. En même temps c’est bien pratique pour se plaindre de l’absence de changements — image produite avec Midjourney.

Cet article des Echos insistait sur un point très important de l’organisation lié à la transformation digitale : il ne sert à rien de casser les silos pour faciliter la transformation digitale, cela peut même être contre-productif.

Les prémisses de cet article sont bonnes. Mais malheureusement certains de mes propos y avaient été « légèrement » déformés. J’avais répondu à quelques questions qui m’ont été posées lors du Hub forum 2014 par mon ami Bruno Fridlansky.

J’ai repris ces propos qui me permettent ici de rétablir l’intégralité de mon discours. L‘organisation en silos n’est ni bonne ni mauvaise. Elle est les deux à la fois, mais rien ne sert de casser ces silos artificiellement. Sauf pour alimenter les discussions de salons. Mieux vaut favoriser l’intrapreneuriat. Voici mes explications.

Casser les silos de l’organisation : le plus grand mythe de la transformation digitale

Casser les silos de l'organisation : le mythe de la transformation digitale
l’intrapreneur est comme le demi de mêlée (ici le stade de France lors du match contre Clermont il y a 15 jours à Jean Bouin). Il est petit, mais agile et rapide et n’a que faire de casser les silos, car il est trop occupé à entraîner les autres dans son sillage.

Les silos organisationnels ne sont ni bons ni mauvais

Rien ne sert de s’énerver, comme je l’entends systématiquement à chaque fois que la transformation digitale et l’innovation sont évoqués. Ces pauvres silos organisationnels n’ont rien fait à personne (je vois que Claude Super a traité aussi de ce sujet).

L’organisation étanche par processus se crée voire se recrée de façon naturelle de façon d’une part à protéger le pouvoir, exécuter les processus plus facilement et permettre aux responsables des organisations de mesurer les résultats de façon plus aisée.

On peut écrire des livres sur 300 pages pour expliquer qu’il est plus efficace de travailler avec son voisin.

Casser les silos
Casser les silos : plus facile à faire avec Midjourney que dans la vraie vie

Il est par contre beaucoup plus difficile d’aller expliquer comment mesurer ce qui ne peut être mesuré et notamment la capacité à travailler à plusieurs en transverse d’une organisation.

Organisations pluri-matricielles et efficacité du travail

Quiconque a travaillé dans une organisation pluri-matricielle sait l’inefficacité et la paralysie engendrée par ce type d’organisations.

Croyez-moi j’ai assez modélisé ce type d’organisations en tant que maîtrise d’ouvrage, lorsque je devais automatiser des processus commerciaux et marketing au travers de logiciels de CRM. J’ai payé pour le savoir.

Quand tout le monde « reporte* » à tout le monde et que tout le monde travaille avec tout le monde, la mesure du résultat n’est pas facile et le gain en efficacité pas forcément aussi bon qu’on pourrait l’espérer (il y a des exceptions mais elles sont rares).

NDLR* : s’entend au sens anglais du terme, c’est-à-dire littéralement « quand tout le monde est le chef de tout le monde » mais cette expression est peu traduisible et son adaptation très longue donc pardon à mes lecteurs pour cet anglicisme malheureusement difficilement évitable]

C’est pour cela, que l’on aime ou que l’on n’aime pas, que la pression soit importante et la frustration élevée ou non, que les silos organisationnels sont là pour durer. Mieux vaut vous en faire une raison.

Aucune organisation n’est parfaite

En fait, quiconque a étudié les organisations dans le cadre de l’innovation sait qu’aucune organisation n’est parfaite, et qu’aucun type d’organisations ne permet de résoudre la difficile question de l’innovation à l’intérieur d’une entreprise.

Ce qui permet de résoudre ces équations subtiles ne sont pas des organigrammes, mais des hommes, des compétences et le leadership qui favorise – ou non – leur travail.

la vidéo de Bruno sur son blog Consonaute

Le travail de l’innovation transverse peut et doit prendre pied au travers des silos organisationnels

Mais le travail transverse, indispensable préalable à l’innovation, peut et doit prendre pied au travers de ces différents silos, en faisant fi de ces difficultés.

Ceci ne veut pas dire en conclusion, comme cela est expliqué dans l’article ci-dessous que je glorifie l’organisation en silos (je répète, il n’existe pas d’organisation parfaite pour l’innovation), ce que cela veut dire vraiment c’est qu’il n’est pas nécessaire de “casser » ni les silos ni les organisations ni les personnes qui les représentent pour innover, il existe d’autres méthodes qui permettent de contourner la difficulté.

C’est ce que dans la vidéo je décris comme la méthode du « demi de mêlée » qui n’est pas le plus gros ni le plus lourd, mais qui est certainement celui qui est le plus malin et qui court le plus vite.

Un intrapreneur sait vraiment « casser » les silos

C’est là qu’entre en jeu l’intrapreneur. Il ne s’agit pas d’une faute de frappe, l’intrapreneur est la personne, ou le groupe de personnes, qui arrive à innover à la manière des entrepreneurs à l’intérieur d’une (grande) organisation.

Pour réussir, l’intrapreneur se moque complètement de l’organisation. Les organigrammes peuvent changer au jour le jour, voire même ne pas exister (ne riez pas, c’est la majorité des cas : l’organisation change tellement vite que l’organigramme n’a même pas le temps de s’adapter et que personne ne connaît vraiment la hiérarchie qui se reconfigure en permance).

L’intrapreneur n’a que faire de l’organisation

Il se moque tout à fait de cette organisation non pas parce qu’il est un anarchiste ni qu’il cherche à renverser le pouvoir, même si certaines personnes peuvent le penser. Il se moque de cette organisation car elle n’a pas d’importance.

casser les silos
Même quand on a cassé les silos, on ne casse pas forcément des briques non plus. Les 4 types d’organisation les plus courants pour l’innovation. Le cabinet CCA en 2010 a démontré qu’aucune de ces organisations n’était bonne ni mauvaise. Seuls comptent le leadership et la mise en œuvre.

La seule chose qui compte ce sont les personnes de qualité, sur lesquelles il ou elle va pouvoir se reposer.

À la manière du demi de mêlée, l’intrapreneur est agile il va vite et il se débrouille pour trouver une solution à un problème a priori insoluble (il est petit et léger alors que ses adversaires sont lourds et énormes).

Un intrapeneur ne lutte contre personne, sauf l’immobilisme

L’intrapreneur ne lutte pas contre des adversaires, il lutte contre l’immobilisme et les freins au changement.

Pour ce faire il va s’appuyer sur les hiérarchies de la compétence qui mènera à une auto organisation de l’innovation qui ensuite, sur la base des preuves qu’il aura établies permettra ensuite de structurer une organisation… Si nécessaire.

l'innovateur ne demande pas s'il vous plaît, il demande pardon (David Armano)
Casser les silos ? L’innovateur ne demande pas s’il vous plaît, il demande pardon (David Armano)

En conclusion, l’intrapreneur ne demande jamais s’il vous plaît, il ne pose jamais la question de savoir où il se situe dans l’organisation ni si son « job description » contient l’objectif de réussir

Il prend l’initiative et cherche les acteurs de changement sur lesquels s’appuyer.

Ceci ne veut pas dire bien entendu que l’innovation ne peut pas arriver par le haut. Cela est tout à fait possible, et même souhaitable.

Ceci étant, la méthode ne change pas. Même si vous êtes soutenus par le haut, soyez humbles et travaillez comme des intrapreneurs car telle est la méthode pour faire réussir l’innovation qui par définition vient bousculer l’ordre établi et nécessite donc qu’on change aussi les méthodes de travail si l’on veut changer le résultat.

Nous vous conseillons aussi de lire notre article de conseils sur l’intrapreneuriat et la conduite du changement.

Article des Echos du 10/09/2014 sur le « Casser les Silos »

Selon Yann Gourvennec, le chief digital officer unique n’a pas d’avenir.

Chaque métier de l’entreprise se numérise à son rythme. Il préconise une organisation en silos. Yann Gourvennec envoie valser les idées préconçues de la transformation numérique.

A domicile dans les locaux de l’agence Visionary Marketing qu’il a crée, l’ancien directeur Internet d’Orange Business Services a donné, mardi 9 septembre, ses recettes de gestion de projets innovants. Consultants et experts vantent les mérites de la transversalité et appellent à « casser les silos » dans les entreprises.

Lui plébiscite cette organisation en business units, traditionnelle et réputée être un frein pour la collaboration inter services. « L’expérience montre que cela marche mieux quand l’entreprise est organisée en silos, marque t il, c’est beaucoup plus facile de manager en confiant un objectif de P&L à chacun (Profit and loss : une modéllisation du business qui fait apparaître les marges envisagées ou réalisée, ndlr) plutôt qu’en essayant de convaincre que travailler avec untel améliorera le résultat ».

Ce qui n’empêche pas les métiers d’échanger entre eux. Ils y ont même chacun un intérêt pour leur rentabilité à l’image des équipes marketing et de la DSI dans le domaine des mégadonnées (Big Data), par exemple.

Lire le reste de l’article des Echos

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Yann Gourvennec

Yann Gourvennec created visionarymarketing.com in 1996. He is a speaker and author of 6 books. In 2014 he went from intrapreneur to entrepreneur, when he created his digital marketing agency. ———————————————————— Yann Gourvennec a créé visionarymarketing.com en 1996. Il est conférencier et auteur de 6 livres. En 2014, il est passé d'intrapreneur à entrepreneur en créant son agence de marketing numérique. More »

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